Juste après son arrivée au gouvernement, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a annoncé que le régime des licences d'importation mis en place en 2015 sera maintenu. Et voilà que ce dossier, qui a alimenté les débats ces deux dernières années, connaît un revirement, et ce, après avoir été marqué par le manque de clarification. A chaque fois, de nouvelles mesures sont annoncées dans ce cadre. Instauré le 6 décembre 2015, ce régime a, en effet, connu de nombreuses modifications tout au long de cette période, pour être carrément supprimé en cette fin d'année comme l'a annoncé tout récemment le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, à l'occasion d'une rencontre avec les cadres de son secteur. Mais avant d'arriver à ce stade, cette question a suscité beaucoup d'interrogations auprès des opérateurs économiques, des experts et des partenaires commerciaux de l'Algérie. C'est surtout le manque d'explications qui est mis en avant. «Le programme des restrictions n'est pas affiché clairement : le fait d'introduire des mesures nouvelles au jour le jour, comme on l'observe au cours des derniers mois, laisse transparaître une forme d'improvisation qui n'aide pas à donner de la visibilité et de l'efficacité aux mesures prises», a remarqué à ce sujet, dans une de ses sorties médiatiques, l'économiste spécialiste en commerce extérieur, Mouloud Heddir. Justement, les tergiversations autour de cette question sont nombreuses. En juin dernier, il y a eu le décret 17-202, qui a apporté un amendement concernant le mode de délivrance de ces licences, soumettant toute décision du ministère du Commerce relative à l'octroi d'une licence à la validation du Premier ministre, alors qu'initialement, ces licences étaient délivrées par les secteurs ministériels concernés sur la base d'une demande accompagnée de documents justifiant la conformité des produits selon leur nature et la situation juridique des opérateurs économiques. Une décision annulée après le retour d'Ahmed Ouyahia, qui a décidé que l'obtention des licences est tributaire du seul ministère du Commerce. Par la suite, en juillet dernier, il y a eu la suspension de l'importation de certaines matières premières alimentaires. Ce qui avait suscité l'inquiétude des producteurs de certaines filières. Et ce, conformément à l'instruction adressée aux banques le 4 juillet 2017 par l'Association des banques et établissements financiers (ABED), les invitant à suspendre les domiciliations bancaires pour les opérations d'importation d'une centaine de produits, dont une bonne partie entrant dans la catégorie alimentaire. En août, une nouvelle liste de 11 produits, dont les farines et céréales, est établie par l'ABEF dans ce cadre. En cette fin 2017, on assiste à un véritable retournement. Désormais, il ne sera plus question de licences mais de produits interdits à l'importation, au total 851. Un décret exécutif sera prochainement promulgué pour fixer une liste de marchandises, dont l'importation sera provisoirement suspendue. «Ce dispositif a non seulement montré ses limites, mais c'est aussi un système bureaucratique et manquant de transparence, sans compter qu'il a engendré parfois des problèmes d'approvisionnement». C'est ainsi qu'a justifié le ministre ce changement de cap. Et les effets d'une telle annonce ne se sont pas fait attendre. «Les prix ont augmenté en deux jours. Il a suffi qu'on annonce l'interdiction d'importation de fruits secs pour que leurs prix augmentent chez les distributeurs», se plaignent déjà les grossistes. Qu'en sera-t-il, alors pour 2018 une fois la mesure mise en œuvre ?