Après l'agression dont ils ont été victimes, mercredi dernier, les médecins résidents déclarent qu'ils maintiennent leur grève illimitée jusqu'à l'intervention du Premier ministre. Ainsi ils tournent le dos au ministre de la Santé. La tension est montée d'un cran. Les médecins blessés affirment qu'ils vont porter plainte. Retour, avec les différentes positions, sur cette journée qui a choqué les Algériens. Les scènes de brutalités dont été victimes les médecins résidents, agressés violemment mercredi par la police à l'entrée de l'hôpital Mustapha Pacha, ont choqué tous les Algériens. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que ces résidents, qui sont au nombre de 15 000, selon les chiffres officiels, en grève depuis le 14 novembre dernier, n'en sont pas à leur première protestation ! «Il faut savoir que nos revendications, qui sont les mêmes, ne sont aucunement satisfaites par la tutelle depuis plusieurs années», s'indignent les résidents interviewés sur le sujet. On se demande comment le gouvernement ne peut pas prendre en charge leurs doléances, quand l'un de ses membres, en l'occurrence l'ancien ministre de la Santé, Abdelmalek Boudiaf, déclare publiquement que «l'Algérie dispose aussi des meilleures structures et de moyens que plusieurs pays européens et certains établissements américains» ! Sauf qu'au moindre souci de santé, aucun de ces hauts responsables de l'Etat ne prend le risque de se soigner au pays et se précipite afin de se faire prendre en charge à l'étranger, notamment en France. Pour l'instant, silence radio de la part de la tutelle. Quant aux résidents, ils maintiennent leurs revendications dont «le service civil qui bloque les résidents, le service militaire que les garçons accomplissent après le service civil, l'amélioration des conditions de travail, le congé de maternité qui ne dépasse pas un mois et est soumis à l'approbation seule des professeurs ainsi que la question du statut du résident et celle des œuvres sociales qu'ils n'ont pas touchées depuis 2011». Opération chirurgicale «Ce qui s'est passé hier a atteint un point de non-retour. Nous n'allons plus faire marche arrière et il n'est plus question de négocier avec le ministre de la Santé et celui de l'Enseignement supérieur que nous avons déjà rencontrés à trois reprises. Notre mouvement continue jusqu'à la prise en charge de notre plateforme de revendications signée lors de la rencontre nationale tenue en novembre dernier à Constantine», assure le Dr Abdelmoumen Habibi, résident en radiologie à Constantine et membre fondateur du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), qui mène actuellement le mouvement de la grève. Le bilan des médecins agressés s'élève, selon certains de leurs collègues que nous avons interrogés, à «20 résidents». Or le Dr Habibi précise que leur collectif ne dispose aujourd'hui que de «13 certificats délivrés par les médecins légistes qui ont consulté les blessés dont les congés de repos accordés atteignent parfois plus de 15 jours». «Les médecins attaqués vont tous déposer plainte «pour agression» contre les éléments de la police d'Alger qui sont intervenus lors de la manifestation avortée», indique le Dr Habibi. Une victime de l'agression, le Dr Joudi, résident en réanimation à Alger, serait, encore selon nos informations, «en observation à l'hôpital de Maillot de Bab El Oued». le Dr Sarah Messaid, du collectif CHU Beni Messous, qui le connaît, jointe par téléphone, explique qu'«il est atteint d'un hématome extra-dural avec une fracture au niveau de sa vertèbre cervicale». «Selon les informations dont je dispose, le Dr Joudi a subi une opération chirurgicale au niveau du même l'hôpital et il doit en subir une autre au niveau de sa vertèbre», révèle-t-elle. Etat Par ailleurs, dans la soirée de mercredi, les résidents de l'hôpital de Mustapha Pacha ont décidé de suspendre momentanément le service minimum qu'ils ont maintenu depuis le début de leur protestation. Selon nos informations, ces derniers n'ont repris le service qu'après la libération de tous les résidents interpellés par la police, dont le nombre ne nous a pas été communiqué. L'autre point culminant est celui en lien avec la déclaration du Syndicat des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires (Snechu). Selon le Dr Habibi et certains résidents que nous avons contactés, le Snechu a «demandé aux résidents de boycotter les prochains examens de résidanat, dont les premiers candidats seront ceux de la pédiatrie qui s'apprêtent à les entamer ce dimanche». Alors que la Sûreté nationale n'a émis aucun communiqué sur cette affaire, du côté des ministères concernés, seul le conseiller du ministre de la Santé, Slim Belkessam, a réagi, en marge d'une conférence de presse sur la grippe saisonnière, en affirmant que «les portes du ministère de la Santé demeurent toujours ouvertes pour les médecins résidents». Ce dernier a appelé, dans la même déclaration, les résidents à «un dialogue responsable et réaliste» qui doit, selon lui, «demeurer un moyen civilisé afin de traiter tous les problèmes». «Lorsqu'on soumet une plateforme de revendications, on entre dans un cycle de négociations jusqu'à ce que l'on trouve un terrain d'entente. Après expertise juridique, nous avons confirmé aux médecins résidents leur droit légal aux œuvres sociales. Pour ce qui est du service national, cela ne relève pas des compétences du ministère de la Santé. Quant à la demande d'aménagement du service civil, nous leur avons signifié que nous sommes d'accord et, à cet effet, la première décision annoncée aux représentants des médecins résidents, c'est qu'il n'y aura pas d'affectation d'un nouveau médecin spécialiste au titre du service civil dans un établissement hospitalier qui ne dispose pas de tous les moyens nécessaires à la pratique de sa spécialité», a expliqué M. Belkessam. D'autres point ont été évoqués par lui, sauf que les résidents semblent ne pas vraiment y prêté attention. Pour eux, la confiance avec le ministre de la Santé «est résiliée». Ils exigent «l'intervention du Premier ministre, Ahmed Ouyahia».