Le patron de Sonatrach dénonce un jeu de poker peu clair auquel s'adonnent les Européens sur leur propre échiquier gazier. Depuis Houston, dans l'Etat du Texas (Etats-Unis), le PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour, estime que «l'Europe n'est pas très claire, un jour ses Etats sont pour des relations à long terme pour pouvoir assurer la sécurité de l'approvisionnement et un autre jour ils demandent à libérer le marché». Le patron de Sonatrach commentait une déclaration d'une responsable du département d'Etat américain, Sandra oudkirk, qui a indiqué lundi que son pays souhaitait lancer un partenariat avec l'Algérie pour assurer la sécurité des approvisionnements de l'Europe. Abdelmoumen Ould Kaddour a expliqué que les pays européens ont commencé à parler de la nécessité de sécuriser l'arrivée du gaz algérien en Europe depuis le conflit gazier russo-ukrainien, qui a remis sur le devant de la scène énergétique la dépendance gazière du continent face à la Russie. Or, pour l'Algérie, «ils mettent des conditions inacceptables, il faut qu'ils sachent ce qu'ils veulent exactement». Le non-dit de ces déclarations, qui s'annoncent en réquisitoire, est que le groupe Sonatrach s'apprête à renégocier avec ses clients européens des contrats de livraison arrivant à terme. En clair, Abdelmoumen Ould Kaddour tente de mettre la pression sur les Européens qui, depuis peu, semblent nourrir des doutes quant aux capacités de Sonatrach à remplir ses obligations, empêtrée dans un déclin chronique de sa production et d'une consommation interne évoluant au pas cadencé. Il s'agissait aussi d'un jeu de pression par lequel les Européens tentent de contraindre Sonatrach à abandonner les contrats de long terme, dont les prix du gaz sont indexés à ceux du pétrole. «Ils ne veulent plus de contrats à long terme, il veulent un marché libre : acheter du gaz quand ils sont en situation de difficulté par rapport à l'approvisionnement de la Russie. Mais quand la situation est plus favorable, ils ne veulent plus de notre gaz», estime Abdelmoumen Ould Kaddour. Face à cette situation, «Sonatrach n'est pas restée les bras croisés et a anticipé la mise en place d'une stratégie commerciale pour diversifier ses débouchés», explique-t-il. «L'investissement dans les méthaniers coûte cher mais permettra au groupe de placer son gaz ailleurs qu'en Europe», souligne-t-il également. On le voit ainsi plus clairement ce jeu de pression par médias interposés auquel s'adonnent les deux partenaires. En tout cas, à mesure que la date des renégociations approche, la pression monte d'un cran, tant chez les Européens, qui tentent ainsi d'arracher des concessions quant aux prix du gaz vendu par l'Algérie, que sur les responsables de Sonatrach qui, bon gré, mal gré n'ont aucun intérêt à ce que la compagnie nationale perde pied sur le marché européen.