Dans la mouvance de la célébration de la Journée internationale des droits des femmes, comment ne pas marquer une halte et réfléchir, pour le long terme et au-delà des activités festives, sur les acquis obtenus et sur ce qui reste à faire, notamment par rapport à leur statut dans la société algérienne d'aujourd'hui. Aller au-delà de des discours de circonstance, des «takrimate», ces hommages hypocrites et machistes des représentants officiels à tous les niveaux, civils ou religieux, qui évitent soigneusement d'aborder la question de l'égalité hommes-femmes dans son ensemble. Egalité, non seulement dans le domaine économique où des avancées sont nettement perceptibles depuis l'indépendance, en dépit d'insuffisances notables en termes d'équité salariale, d'accès aux responsabilités – le fameux plafond de verre – entre autres, mais aussi en matière de droits politiques et juridiques, où les injustices sont, malheureusement, criantes, insupportables. Voire révoltantes pour les concernées d'abord, et pour tout individu épris de justice, animé par une éthique morale d'égalité en droits humains ; leur opposer le dogme religieux, la tradition, rend ces injustices encore plus insupportables, y compris en matière de statut personnel. Notamment en matière d'héritage où les différences entre les hommes et les femmes sont difficiles à vivre dans tous les pays où l'islam est religion d'Etat, comme chez nous où l'on fait croire que, sur ce chapitre, les choses sont désespérément immuables et qu'il faut les accepter. Une première lueur d'espoir dans la remise en cause de cet état de fait, de cette profonde discrimination au sein de la société est venue d'un pays frère voisin et «musulman», où le chef de l'Etat, en l'occurrence Béiji Caïd Essebsi, a jeté, en août dernier, un pavé dans la mare, en suggérant de revoir la question de l'héritage des femmes dans nos pays, brisant ainsi un tabou sacro-saint que personne n'osait effleurer par crainte de se voir traiter d'apostat, de mécréant par les conservateurs de tous poils, tous ceux qui évoluent à contre-courant de l'histoire. Pour célébrer la journée du 8 Mars, à l'appel d'une cinquantaine d'associations de la société civile, plus d'un millier de femmes ont marché samedi dernier à Tunis, relayant ainsi l'appel du président Essebsi autour de la revendication de l'égalité en matière d'héritage entre les hommes et les femmes. Une première sans doute, après le «tsunami» intégriste qui a frappé les pays arabes suite au «printemps» démocratique qui a vu la chute des dictatures en Tunisie et en Egypte. Chez nous, comme en Tunisie, cet effort d'ouverture vers une véritable égalité dans l'héritage et de droits de succession entre les hommes et les femmes doit se faire dans le sens du droit positif, et c'est à ce moment là que l'on pourra apprécier l'état de l'avancée de la démocratie dans le contexte bien défini. Comme l'a déclaré l'islamologue Djabelkheir à El Watan dans l'édition d'hier : «On ne peut pas gouverner des citoyens et des croyants en même temps. Il faut choisir l'un ou l'autre, si la citoyenneté est la même pour tous, les idées et les croyances diffèrent d'un citoyen à l'autre.» Reste à nos gouvernants d'avoir le courage et la volonté politique pour faire ce choix.