L'inégalité dans l'héritage est en contradiction avec, d'une part, la Constitution qui consacre l'égalité entre les citoyens et, de l'autre, avec la réalité socioéconomique du pays et les engagements internationaux de l'Algérie. De nouveau, le constat a établi, jeudi, à Alger, par le Centre de l'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef). Lors de la journée d'étude sur le droit successoral, organisée par l'association à l'hôtel El-Biar, ses représentantes sont revenues sur le travail réalisé par le Ciddef en la matière. Elles ont rappelé qu'en 2010, le Ciddef a rendu public un "plaidoyer pour une égalité de statut successoral entre homme et femme, en Algérie", accompagné d'un dossier de réflexion sur le sujet qui ouvre plusieurs "pistes de changement". Lesquelles pistes s'inspirent de trois principes en islam, reposant ainsi sur les concepts de "la maslaha" (utilité publique), de "la dharoura" (nécessité) et "des maquassid" (finalités de la loi). Comme l'a souligné la directrice du Ciddef, Nadia Aït Zaï, le plaidoyer en question faisait un état des lieux de la législation en matière d'héritage, tout en insistant sur les "graves" inégalités des dispositions, contenues dans le code de la famille, à l'exemple des inégalités entre les conjoints selon le sexe, entre les enfants de sexes opposés et entre les enfants légitimes et les enfants pris en kafala (sorte d'adoption limitée). L'avocate a, également, signalé que pour l'héritage, les règles du droit algérien se réfèrent aux préceptes coraniques et au droit musulman. Mais, notera-t-elle, le droit musulman, tel qu'élaboré en Algérie, "a connu une tentative de modernisation", qui n'a malheureusement pas profité à l'héritage. Résultat : la société algérienne utilise des "subterfuges juridiques" pour contourner cette inégalité. "C'est là un argument pour dire au législateur et aux pouvoirs publics : ne fermons pas les yeux", a déclaré Mme Aït Zaï. Cette dernière a, en outre, rappelé la réaction "positive" de l'opinion publique nationale par rapport à ce plaidoyer. Pour l'intervenante, plusieurs facteurs plaident pour le changement et rendent possible l'égalité entre les femmes et les hommes concernant la question de l'héritage. De la sorte, le verset coranique relatif à la distribution des biens "peut être réinterprété, dans le sens de l'égalité", expliquera-t-elle. Plus loin, la responsable de l'association révèlera que le thème de la rencontre a été sciemment choisi, car "nous voulons interpeller les six candidats à la présidentielle sur la question de l'égalité entre femmes et hommes en droit successoral". Cela dit, la journée d'étude du Ciddef a accueilli, outre des militantes du mouvement associatif, des universitaires et des chercheurs des trois pays du Maghreb (Algérie, Tunisie et Maroc), un représentant de l'ONU-Femmes et une experte française en genre. Elle a été l'occasion de discuter, de façon "critique", sur le droit successoral en vigueur dans leur pays respectif, et d'en savoir plus sur l'expérience française en la matière. La rencontre s'est toutefois distinguée par la présence de Saïd Djabelkheir, chercheur en sciences islamiques et spécialiste du soufisme. Se présentant comme un chercheur et non pas comme un mufti, ce dernier a affiché sa préférence pour la philosophie du fiqh, c'est-à-dire les "règles suivies par les savants dans la démarche de l'ijtihad (effort de réflexion pour interpréter les textes fondateurs de l'islam)". Et, c'est d'ailleurs dans ce cadre, qu'il a affirmé que "le Coran est une révélation, une inspiration qui a été écrite par des humains". À partir de là, il est possible, selon Djabelkheir, d'adapter le droit successoral au nouvel environnement social et aux nouvelles données. "Je ne parle pas de réécriture du Coran mais de son interprétation", a soutenu ce dernier. H. A Nom Adresse email