Le gouvernement américain est décidé à aller jusqu'au bout dans son initiative de réforme au Moyen-Orient et en Afrique du Nord à travers la Middle East Partnership Initiative (MEPI). C'est ce qu'a laissé entendre Scott Carpenter, sous secrétaire d'Etat adjoint chargé du MEPl, lors d'un débat mercredi soir à la résidence de l'ambassade des Etats-Unis à Alger. « Les Etats-Unis n'ont pas l'habitude de commencer des choses et de ne pas les achever », a-t-il expliqué. A ses yeux, l'élection présidentielle du 2 novembre 2004, qui pourrait aboutir à un changement d'Administration à la Maison-Blanche, ne peut influencer ce qui apparaît comme un option stratégique de Washington. Lancée en 2002, la MEPI est dotée de 200 millions de dollars. Selon Scott Carpenter, qui a visité Alger avec son collaborateur Charles King Mallory, 100 millions de dollars seront rajoutés en 2005 à ce projet de soutien aux réformes politiques et économiques. « Il s'agit plus d'assistance technique que d'argent. Une question de savoir-faire », a précisé le responsable US pour expliquer la faiblesse relative des dotations du MEPI par rapport à d'autres programmes comme ceux orientés vers l'Europe de l'Est ou celui du Millennium Challenge (défi du millénaire) qui bénéficie principalement à des pays comme l'Egypte, le Maroc, la Jordanie et le Bahrein. « Pour nous, il n'y a pas de pays prioritaires. Nous travaillerons avec des pays où il y a une réelle volonté de réforme et où il y a de bonnes idées », a précisé l'envoyé spécial du département d'Etat. Les animateurs du MEPI, qui se veut un programme pratique, sont disposés à travailler avec les gouvernements et la société civile. A la mi-juillet 2004, Alina Romanowski, déléguée du secrétaire d'Etat adjointe pour le Proche-Orient, a rendu visite au Maghreb et avait annoncé le lancement de plusieurs programmes destinés aux femmes et aux jeunes. Scott Carpenter est venu à Alger pour suivre l'évolution du MEPI, dont la direction est installée à Tunis, et prendre note des propositions des différents acteurs travaillant dans les secteurs de l'éducation, la justice, les médias et l'économie. Il a annoncé l'organisation à Alger d'un atelier où les objectifs de la MEPI seront expliqués. « Nous allons répondre à toutes les questions », a-t-il promis. Une partie du MEPI est consacrée, depuis quelque temps, à l'assistance technique pour l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le département d'Etat vient de lancer le Middle East Entrepreneur Training (Meet US), un programme de formation ouvert aux entrepreneurs du Maghreb et du Moyen-Orient. Une première session est prévue en décembre prochain à San Diego (Californie). Des opérateurs économiques ont créé, depuis quelques mois, le Centre d'affaires algéro-américains. Des opérateurs qui ont du mal à trouver des interlocuteurs aux Etats-Unis. Regret exprimé par un représentant du patronat algérien à Scott Carpenter. A l'adresse des médias, l'idée de créer un « Centre d'excellence » pour les journalistes est retenue. Des programmes de formation des animateurs du mouvement associatif vont être lancés, selon les besoins exprimés. Des responsables américains, dont des diplomates, souhaitent créer l'université américaine au Maghreb dont le siège sera à Alger. Une université à l'image de celles du Caire, de Beyrouth et d'Istanbul. En décembre prochain, une première réunion du « Forum pour l'avenir » aura lieu au Maroc. A l'initiative de Washington, ce forum, installé à la fin septembre 2004, est soutenu par les pays du G8. L'idée a été lancée lors du sommet de ce groupe en juin 2004 à Sea Island. Le président Abdelaziz Bouteflika avait, pour rappel, assisté à ce sommet. « Nous considérons que le “Forum pour l'avenir” représente une occasion extrêmement prometteuse pour les partenaires du G8 et les pays de la région de travailler ensemble à une réforme politique, économique et sociale », a déclaré dernièrement à New York, Colin Powell, secrétaire d'Etat. Jeudi 7 octobre, des ONG marocaines des droits de l'homme ont dénoncé l'accord donné par Rabat aux Etats-Unis pour l'organisation de ce forum. Des ONG qui, selon l'APS, ont parlé de « projet colonial ». Scott Carpenter, qui a passé une dizaine de mois en Irak, ne pense pas que la situation au Moyen-Orient va « freiner » l'évolution du projet du MEPI. Mais, il a reconnu la nécessité pour Washington d'améliorer son image dans le monde arabe et musulman. Parlant d'une tournée dans Alger, dans les endroits frappés par la violence des années de feu, Scott Carpenter dit avoir senti le même désir de vivre chez les populations qu'en Irak. Il a soigneusement évité de s'étaler sur la situation politique dans le pays, mais a salué « la volonté » de lancer des réformes.