L'impopularité de la guerre en Irak a permis à l'opposition démocrate de s'emparer en 2006 du Congrès américain, condamnant le républicain George W. Bush à une cohabitation inconfortable pour les deux dernières années de sa présidence. Pour la première fois depuis 12 ans, les démocrates seront à partir de janvier majoritaires à la chambre des représentants, ainsi qu'au Sénat, ce qui les rendra en mesure de fixer l'ordre du jour politique. Principal facteur de leur victoire électorale du 7 novembre, la gestion de la guerre en Irak échappera cependant largement aux démocrates, l'administration Bush gardant à peu près tous les pouvoirs en matière de politique étrangère et de défense. S'appuyant sur son pouvoir de multiplier les auditions et d'adopter des résolutions non contraignantes, la nouvelle majorité va disposer de puissants moyens de pression pour tenter de convaincre Bush de se ranger à ses principales revendications : la nécessité d'amorcer un retrait des troupes et d'impliquer les pays voisins de l'Irak, y compris la Syrie et l'Iran, dans la recherche d'une solution. Bush sera contraint de tenir compte des positions d'adversaires qu'il a combattus sans pitié pendant six ans et dont il avait caricaturé sans relâche les positions. « L'approche des démocrates au sujet de l'Irak est la suivante : ce sont les terroristes qui gagnent et c'est l'Amérique qui perd. L'objectif des démocrates, c'est de partir d'Irak ; l'objectif des républicains, c'est de remporter la victoire en Irak », avait dit Bush à une semaine des élections. Les démocrates, eux, avaient fait campagne sur le thème presque unique du changement, tirant un profit maximum de l'impopularité de la guerre. Ils avaient également su exploiter l'usure du pouvoir des républicains, accusés sans relâche d'entretenir une « culture de corruption ». Par ailleurs, les responsables démocrates savent que le mandat confié par les électeurs risque d'être difficile à mettre en œuvre, limités qu'ils sont par le droit de veto présidentiel et l'étroitesse de leur majorité au Sénat (51 sièges contre 49) : hormis des mesures techniques, comme le relèvement du salaire minimum et l'assainissement des pratiques parlementaires, ils n'auront guère de marge de manœuvre pour imposer des réformes ambitieuses. Mais du moins pourront-ils rôder un argumentaire dans la perspective de la campagne présidentielle pour 2008, déjà ouverte de facto. Un premier candidat de second rang s'est déjà déclaré, le démocrate Tom Vilsack, alors que font figure de favoris dans son camp les sénateurs Hillary Clinton et Barack Obama, qui ont dépensé sans compter, en argent ou en charisme, pour assurer la victoire électorale du 7 novembre.