À quelques heures de la clôture du festival et de la remise des prix, il est difficile d'émettre une seule hypothèse sur les heureux lauréats (trois distinctions concernant la fiction, le documentaire et le cinéma d'animation), tant les productions rivalisent de qualité et de richesse thématique. Le festival connaît ses dernières projections et on ne peut mieux finir une rencontre culturelle, riche au sens le plus noble du terme, que par Zim Zam, un dessin animé de 6 minutes de Matoub Massinissa. Une histoire d'action et d'humour qui raconte la vie quotidienne et les aventures de deux extraterrestres se nommant Zim et Zam. Un récit d'une grande beauté lyrique qui ne peut laisser indifférent, même les adultes. Un essai réussi, sommes-nous tentés de dire, qui gagnerait à être vu par nos enfants dans une large diffusion. Alors que nous tentons de recueillir les pronostics de nos confrères sur les futurs détenteurs de l'Olivier d'or, l'on nous apprend que l'ENTV s'est engagée à racheter les droits de trois films amazighs. Voilà qui couronne un cinéma dont des spécialistes étrangers, à l'image de la réalisatrice libanaise Cynthia Choucair, ont reconnu « la beauté et le réalisme ». Comment ne pas être fier d'un festival cinématographique, le seul qui représente le pays, lorsque l'on sait qu'outre Berlin et Venise, entre autres, Marrakech a aussi son festival qui réunit les plus grands noms du cinéma du monde, chaque mois de décembre. « L'objectif essentiel du festival est de présenter la production filmique nationale et internationale sous une optique culturelle, artistique et sociologique », avait dit, dans son allocution d'ouverture (lue par son représentant), la ministre de la Culture, Khalida Toumi. C'est encore plus de consécration pour un festival qui représente le cinéma national. Ce qui est plus intéressant dans cette manifestation ouverte au grand public, en dépit de sa désaffection incompréhensible, c'est incontestablement sa multidisciplinarité. Ainsi, le participant ou le simple citoyen peuvent s'abreuver de films, mais aussi de littérature, d'expositions d'affiches, de peinture et de pratiques traditionnelles. Pour l'exemple, dans Etude de cas, programmé dans le séminaire Littérature et cinéma, Mlle Hanane El Bachir, universitaire et chercheuse, a montré, chez le romancier Azzouz Begag (Le Gône du Chaâba), l'intérêt des spécialistes au travail de récréation et de transposition du récit à l'œuvre filmique. Ce qui, selon elle, incite à soulever diverses questions : « Y a-t-il complémentarité ou divergence entre l'œuvre romanesque et l'œuvre filmique ? Quelle est la finalité de l'adaptation ? Comment sont compris les éléments romanesques et filmiques ? A quels signifiés renvoient-ils dans tel ou tel cas ? Enfin, nous tenterons de mettre en évidence la spécificité de l'une et l'autre écriture à partir d'exemples puisés dans le livre et dans le film. » C'est dire l'envergure d'un festival où seuls les absents ont tort. Un festival où la culture irlandaise est également omniprésente avec quatre courts métrages choisis par Cork Film Festival. C'est aussi, comme le disent les organisateurs, une carte blanche à Edith Pieperhoff, l'une des meilleures réalisatrices du court métrage irlandais et que le cinéphile a pu voir avec délectation quatre de ses films ayant pour thème les contes folkloriques des quatre coin du monde. Avant une sortie touristique sur les régions de Beni Snous, connue pour son ayred (le lion) et Nedroma, Fatma Flora Mouheb, cantatrice et conteuse kabyle, nous dit, avec un sourire enchanteur : « En venant à Tlemcen, j'ai découvert pratiquement les mêmes pratiques traditionnelles, des similitudes dans notre façon de penser, la même pudeur. Enfin, j'ai redécouvert que Tlemcen, Béjaïa, Béchar, Annaba ou Oran, c'est l'Algérie dans sa diversité et j'en suis toute fière. » C'est aussi cela le festival, une rencontre où les Algériens se sentent réhabilités et se réconcilient avec eux-mêmes. Pardon, c'est l'heure de la cérémonie de clôture et de... la remise des trophées. A demain !