La vie institutionnelle du pays semble suspendre son cours depuis l'ouverture du procès Khalifa et les révélations faites par les accusés quant à l'implication de hautes personnalités que la justice aura à confirmer ou à infirmer. Pour l'heure, seuls quelques noms de personnalités qui se comptent sur les doigts d'une main sont cités comme témoins ou accusés : l'ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, d'anciens ministres et un ministre en poste. Bien que les dommages collatéraux de l'affaire Khalifa sur la crédibilité de l'Etat soient pour le moment circonscrits à des agissements que l'on présente comme étant des cas isolés qui n'engagent pas la responsabilité de l'Etat algérien et de ses institutions, il apparaît clairement que l'onde de choc de ce procès ne se fait pas seulement sentir au niveau des échelons subalternes et intermédiaires des responsabilités. C'est aussi une source de grande inquiétude même pour les sphères de décisions. Dans les discussions de salons et dans les coulisses des manifestations officielles qui se déroulent à l'ombre de ce procès qui occupe le devant de l'actualité nationale depuis son ouverture, on ne parle que du procès de l'affaire Khalifa et de ses retombées politiques. On s'y perd en conjectures. Le procès qui se déroule à Blida s'est transposé sur la place publique donnant lieu à un tribunal populaire parallèle qui a déjà jugé et prononcé son verdict dans cette affaire en réclamant des têtes couronnées : les puissants soutiens au niveau des hautes sphères de décision dont avait bénéficié Moumen Khalifa et sans lesquels l'empire Khalifa n'aurait pas existé. Les frémissements qui parviennent du tribunal de Blida créditent ce dernier de préjugés plutôt favorables en ce sens que c'est la première fois dans les annales de la justice algérienne que l'on va aussi loin dans le déroulement d'un procès en citant à comparaître de hauts responsables de l'Etat, dont des ministres. Le tribunal a ouvert une brèche. Jusqu'ici, la présidente du tribunal a fait montre d'une vigilance à toute épreuve pour éviter que le procès ne dérapât et ne se transformât en procès du système. Cependant, la magistrate en charge du procès a déjà fait les frais d'un tel exercice ô combien périlleux : des noms de personnalités non cités dans l'arrêt de renvoi sont balancés par les accusés. Et c'est ce qui inquiète précisément certains cercles du pouvoir. Les effets de l'affaire Khalifa sur la vie nationale se font déjà lourdement sentir. La vie politique et institutionnelle, économique, voire sportive, est entrée depuis le début du procès dans une profonde léthargie. Le pays entier est en stand-by : les entreprises et organismes dont les responsables sont mis en cause dans l'affaire Khalifa, le monde sportif, les hauts responsables de l'Etat impliqués à un titre ou à un autre, les « intouchables » qui ne savent pas combien de temps durera « leur immunité... » Jusqu'à nos partenaires étrangers qui suivent avec intérêt ce procès. Qui a dit que le groupe Khalifa n'était pas un Etat dans un Etat ?