Le réchauffement climatique peut-il favoriser l'émergence de nouvelles maladies ou accélérer la transmission de certains virus ? Les scientifiques craignent surtout l'émergence d'arboviroses, des virus transmis par les insectes, essentiellement les moustiques. On connaît bien le paludisme, et il ne devrait pas bouleverser le paysage épidémiologique. Il n'en va pas de même pour la fièvre de la vallée du Rift, par exemple. En 1997, du Kenya, elle avait migré en Arabie Saoudite et au Yémen suite à l'importation de moutons. Réapparue dans le pays fin 2006, on ignore cette fois-ci de quelle manière elle va se transformer. On a remarqué par ailleurs que l'Aedes albopictus, un moustique d'origine asiatique, responsable de la transmission de la dengue et de la fièvre jaune, a commencé à coloniser le Nigeria et le Cameroun… Justement, comment l'augmentation des températures contribue-t-elle au développement des moustiques ? De deux manières. D'abord, en raccourcissant la durée de développement de l'œuf à l'adulte. Si l'été arrive plus tôt et l'hiver plus tard, il y aura donc davantage de générations de moustiques. En conséquence, davantage de moustiques au contact de l'homme, une plus forte probabilité de trouver des moustiques infectés si le virus est introduit, et à l'arrivée, davantage de personnes infectées. Mais ce n'est pas tout : la température accélère aussi le cycle viral à l'intérieur du moustique. Une fois dans l'insecte, le virus se multiplie et au bout d'un certain temps, colonise les glandes salivaires. De sorte que la femelle, lorsqu'elle pique pour prélever le sang, recrache aussi de la salive infectée. Les scientifiques ne savent pas encore l'expliquer mais la chaleur active ce processus. Les experts annoncent aussi un déplacement de la mousson et des pluies plus abondantes à certains endroits. Cela peut-il aussi être favorable aux moustiques ? Bien sûr, car les moustiques ont aussi besoin d'humidité pour se développer. Les œufs, protégés par une capsule imperméable, sont capables de résister des années (jusqu'à cinq ou six ans dans le cas de la fièvre de la vallée du Rift) à la sécheresse. Et dès les premières pluies, ils éclosent par nuées, car les femelles pondent à la limite des zones d'eau. Le virus, lui, résiste aussi. Car la femelle le transmet à ses œufs… Le Maghreb est-il préparé à l'arrivée de nouveaux virus ? Les chercheurs tunisiens ont mis en évidence un risque potentiel de transmission de la fièvre de la vallée du Rift par leurs moustiques. D'autres études sont en cours pour la dengue. Mais il faudrait que la Tunisie, le Maroc et l'Algérie s'unissent pour faire des recherches régionales. L'économie des pays d'Afrique du Nord étant plus développée que celle de l'Afrique subsaharienne, on peut penser que les risques sont plus limités. Après, c'est aussi une question d'éducation de la population. Il faut que les gens comprennent que l'eau stagnante est un foyer pour les moustiques. En Algérie, le stockage de l'eau est une nécessité, compte tenu des rationnements… L'éducation sanitaire est un travail de longue haleine. Mais l'exemple de La Réunion doit servir d'exemple : si un tiers de la population est tombée malade à cause du chikungunya, c'est en partie à cause de ces foyers d'eau anarchiques.