Une double avant-première puisque ce quatrième long métrage de Okacha Touita inaugure * le volet cinéma de l'évènement Alger, capitale de la culture arabe pour lequel il est prévu la sortie de 22 longs métrages, 44 documentaires et courts métrages de fiction et 11 téléfilms ainsi que la tenue en novembre d'un festival international du cinéma. S'inscrivant dans la tradition des films tirés d'une œuvre littéraire, Morituri a en fait été écrit sur la base de trois romans de Yasmina Khadra, dans sa période « polar sociopolitique » centrée sur le personnage du commissaire Llob. Il s'agit de Morituri qui a fourni l'essentiel de la trame, mais aussi de Double blanc et de L'automne des chimères. L'écrivain a participé directement à la concoction du scénario, ce qui devrait préserver l'empreinte initiale du livre en laissant libre cours à la création du réalisateur. Produit, côté algérien, par le ministère de la Culture avec le soutien de l'ENTV, le film a été soutenu côté français par Wallworks et le Centre national de la cinématographie. L'œuvre bénéficie ainsi d'une double nationalité. Tourné durant l'été 2004 à Alger, Morituri situe son action dans la tragédie algérienne des années 1990. Brahim Llob, personnage désabusé, enquêtant sur la disparition de la fille d'un potentat, débusque un groupe terroriste chargé de l'élimination des intellectuels. Mais à mesure qu'il avance dans son enquête, celle-ci se complique pour mettre à jour un immense imbroglio où se mêlent affaires et luttes d'influences. Le rôle principal est revenu à Miloud Khetib qui se confirme dans son talent et en tant qu'acteur fétiche du réalisateur puisqu'il a déjà joué sous sa direction (Les sacrifiés, 1982 et Le cri des hommes, 1990). La distribution comprend également des pointures comme Sid Ahmed Agoumi, Sid Ali Kouiret et Azzedine Bourarghda. L'image confiée à Allel Yahiaoui est soutenue par une musique de Rachid Taha et les décors sont de l'artiste Areski Larbi. Né en 1943 à Mostaganem, Touita, qui vit en France depuis plus de quarante ans, se distingue par une filmographie tournée vers l'histoire récente de l'Algérie. Dans Rue Tartarin (court métrage de 1980 présenté à Cannes), puis dans Les sacrifiés, son premier long métrage, il a abordé le thème douloureux des luttes entre le FLN et le MNA au sein de l'émigration. Le cri des hommes, qui montrait la répression de l'armée et des services de polices français contre les nationalistes, avait dû attendre neuf ans avant de pouvoir être diffusé en France. Pour la petite histoire, on notera que c'est le deuxième film de l'histoire du cinéma à s'intituler Morituri, le premier réalisé en 1965 par Bernard Wicki avec Marlon Brando, Yul Brynner et Janet Margolin situait son action dans la bataille du Pacifique en 1942. C'est dire que le cri des gladiateurs de Rome (morituri, ceux qui vont mourir), a trouvé de nombreux échos dans les manifestations de violence et de haine de l'humanité. * L'avant-première, programmée hier soir au cinéma L'Algeria (Alger) sera traitée dans nos prochaines éditions