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Dans quel siècle vivons-nous ?
Publié dans El Watan le 04 - 02 - 2007

A l'aube du 30 décembre 2006 au moment où les premiers rayons de soleil éclairaient les rues de Baghdad et quand déjà de nombreux musulmans se dirigeaient vers les mosquées pour célébrer la fête du sacrifice d'Abraham et prier ensemble pour un monde meilleur juste et tolérant, Saddam Hussein était exécuté.
Ce n'était ni un bandit de grands chemins ni un voleur de moutons ou de chameaux encore moins un renégat. C'était le président d'un des pays les plus riches producteurs de pétrole, que l'Amérique a largement aidé à accéder au pouvoir, comme elle l'a fait dans d'autres contrées quand ses intérêts l'exigeaient. A ce titre, Saddam Hussein n'a pas été ingrat, il va même sacrifier plus de 500 000 de ses fils pour sauvegarder leurs richesses et celles de leurs alliés, notamment les wahhabites saoudiens dont on sait le rôle néfaste qu'ils ont joué dans beaucoup de pays musulmans. Tout le monde le sait, Saddam n'avait aucune arme ou une puissance pouvant menacer l'administration US et ses protégés. En fait, son élimination a été décidée après le 11 septembre 2001 après qu'une commission réunie au mois de novembre de la même année, composée de hauts dignitaires américains qui avaient surtout en commun d'être islamophobes et arabophobes, ait conseillé à l'exécutif de l'Administration US d'entamer des actions d'envergure dans la région du Moyen-Orient. Pour l'adjoint de Rumsfeld, cela signifiait que l'Amérique était partie pour une guerre qui durera durant deux générations et que l'élimination de Saddam et la guerre en Irak en sont la première phase. Ce qui se passe aujourd'hui avec les menaces sur l'Iran ne permettent plus de doute sur les objectifs réels de l'Amérique. Exécuter Saddam Hussein fait partie de ce vaste plan, et le faire le jour de l'Aïd El Kebir n'a d'autre interprétation que de signifier au monde arabo-musulman qu'il ne pèse pas lourd, et que leur projet de modeler la région à leur façon est en marche et ne tolérerait aucune résistance. Saddam Hussein, ce n'est un secret pour personne, n'était pas un saint, il est de la lignée de ces dictateurs sanguinaires que l'humanité n'a hélas que trop connus. De ses crimes, Saddam devra à titre posthume répondre devant son peuple une fois libéré de ses occupants et débarrassé des acolytes qui ont été amenés sur les chars des envahisseurs. C'est à un jury indépendant composé de vrais patriotes qui aura à identifier la nature et la gravité des faits dont se serait rendu coupable le dictateur irakien. C'est à ce jury de décider du châtiment qu'il aurait dû subir, en conformité avec les us et coutumes du pays. Ils auront à se prononcer pour une solution à la Pinochet (qui n'a rien à envier aux crimes de Saddam) ou l'écarteler comme le veut la Charia, le fusiller selon la tradition des tribus ou autres procédés qu'ils jugeront nécessaires. Pour exécuter cette sentence en bons musulmans, ils n'auront pas à choisir un jour qui choquera le monde des monothéistes dont ils se prévalent et qu'ils respectent. Le jour choisi ne sera ni le jour de Noël, ni les jours de sabbat ou du Yom Kippour, ni un matin d'une nouvelle année. Ce qui est à craindre dans cette exécution un jour de piété et de recueillement pour les musulmans, c'est qu'avec le temps qui sait polir les faits, Saddam devienne un martyr qui est mort pour avoir refusé d'obéir aveuglement au diktat de l'Administration US et de ses alliés. Cette exécution a pris l'allure, par le jour choisi, d'une volonté manifeste d'humiliation des musulmans. Elle a pour nous une double vertu, d'abord elle nous aura débarrassés d'un dictateur, mais aussi servira de déclic aux musulmans pour qu'ils relèvent la tête. Désormais, on ne doit avoir aucun complexe, nous n'avons rien à envier à qui que ce soit, nous avons nos valeurs spirituelles, notre culture qui peuvent rivaliser en sagesse, en tolérance, en humanisme avec n'importe quelle autre civilisation. Cela doit nous inciter à renforcer notre cohésion, notre solidarité et à orienter nos richesses au profit de tous ceux qui souffrent et nécessitent aide et assistance. On doit s'éloigner de ceux qui veulent par leur technologie, leur puissance nous imposer leur modèle de société, et nous devons œuvrer pour un monde paisible qui accepte les différences. Il est temps pour nous d'interpeller maintenant que les masques sont tombés ces pigistes qui ne cessent de vociférer à travers les médias sur les musulmans et sur l'Islam et qui nous situent au XVe siècle, car nos valeurs, nos principes et nos connaissances seraient de cette époque si l'on croit ce qu'ils disent et ce qu'ils écrivent. Pour ceux qui exécutent un homme pour humilier l'ensemble du peuple musulman et choquer bien d'autres habitués au respect des traditions, dites-nous dans quel siècle vivent-ils ? Sommes-nous à la période des cow-boys ou des guerres de religion en Europe ou au temps du nazisme, à moins que l'on soit retournés à la période des Croisades ? N'avez-vous pas d'une façon ou d'une autre encouragés ces gens à commettre comme récemment au Liban des actes barbares dont les risques peuvent être catastrophiques pour l'humanité ? L'axe du mal ne se situe pas toujours là où l'on pense ni au même endroit, et il peut être un jour ici comme il peut être demain là-bas. Pour donner un nouvel élan à la construction d'un monde qui est actuellement bien fragile, inhumain et dangereux, il faut développer un vrai dialogue de l'esprit, se débarrasser des préjugés pour ne donner aucune chance à un choc de civilisation. On doit travailler où que l'on soit pour diminuer les souffrances, barrer la route à la tyrannie, lutter contre l'ignorance, la pauvreté et la sous-alimentation. On doit œuvrer pour des ensembles sans hégémonie, sans arrogance et un monde tolérant et paisible. Si nous agissons tous dans cette direction, on peut espérer légitimement que l'axe du mal ne se situera nulle part, il sera SDF.

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