Après les listes AADL et celle des bénéficiaires d'une manière générale, voici venu le temps des listes qui tuent. Celle de Bouguerra Soltani concernant des dossiers sensibles de corruption, celle de Saïd Sadi, des hautes personnalités impliquées dans l'affaire Khalifa, et celles de Benchérif et Mellouk, adorables têtus qui ne cessent de dénoncer les faux moudjahidine et les traîtres à la tête d'importants segments de l'Etat. Les deux hommes ont été plus loin cette fois, avançant le chiffre de 35 000 faussaires qui coûtent au contribuable 7 milliards par mois. C'est bien. Après l'apologie de la masse, le flou des décisions collégiales et les logiques de groupes, ce passage au nominatif est important. C'est le temps des listings, exhaustifs, qualitatifs et individuels. Mais dans le lot, la liste la plus intéressante est certainement celle dont ont encore parlé les deux compères Benchérif et Mellouk. En 1962, lors du référendum de l'autodétermination du peuple algérien, l'immense majorité avait répondu positivement à la question dont allait découler l'indépendance. Dans la ferveur d'une Algérie naissante, dans la joie d'une dignité retrouvée, on avait oublié ceux qui avaient dit non. Ils étaient 16 000 et tout le monde pensait qu'ils étaient depuis morts ou partis en France ou en Inde, tout le monde les pensait anonymes, le vote étant censé avoir été secret. Et bien non, Benchérif et Mellouk ont les noms de ces 16 000 personnes dont certaines semblent détenir des postes importants. Cette liste atomique, véritable bombe historique, va-t-elle être divulguée ? Dans cette guerre de listings qui s'apparente plus à une guerre des nerfs qu'à une guerre de l'information puisque de toutes les listes, aucune n'a encore été dévoilée, peut-être pas. Mais de quoi méditer une fois de plus le célèbre principe de Clausewitz : la menace est supérieure à son exécution.