Les Béjaouis ne seraient pas portés sur la marche à pied comme le sont leurs concitoyens de certaines autres grandes villes du pays. C'est ce qu'invite à croire une enquête (la première du genre pour la wilaya), dont nous détenons exclusivement une copie, qu'a effectuée, pour le compte de la direction des transports de la wilaya de Béjaïa, le Centre national des technologies et consulting (CNTC) de Boumerdès sur les habitudes de déplacements des ménages béjaouis. Béjaïa : De notre bureau Le centre a conclu au fait que les habitants de la ville de Béjaïa se déplacent plus par les moyens de transport motorisés (voitures, bus, taxis,…) qu'à pied. Une prédominance qui n'a pas été constatée lors des rares enquêtes de même envergure (8 seulement en 20 ans) effectuées dans les agglomérations d'Alger, d'Oran, de Constantine et de Annaba, où la mobilité des personnes est plus pédestre que motorisée. La dernière enquête de ce genre a été menée à Alger en 2004. Toutes ont présenté une mobilité moyenne inférieure à celle calculée pour la ville de Béjaïa, où 1560 ménages ont été interrogés entre les 27 février et 20 avril 2006. Le taux représenté par cet échantillon par rapport à la population - mère de 170 311 habitants, soit 24 976 ménages - de la commune de Béjaïa (statistiques de l'ONS, actualisés en 2005) est, pour le CNTC, « très significatif pour la qualité et la représentativité de l'enquête ». Par extrapolation donc, celle-ci a abouti au fait qu'un peu plus de 322 000 déplacements sont réalisés chaque jour par la population. La prédominance masculine n'est vérifiée qu'à partir de l'âge de 21 ans. En deçà, les jeunes filles se déplacent plus que les garçons. 50,54% des personnes interrogées disent se déplacer en mode motorisé contre 49,46% à pied. La marche ne va pas au-delà des 25 minutes en général alors qu'on se déplace en moyenne 30 minutes en bus par personne et par jour. Essentiellement par les moyens de transport collectif qui participent à près de 80% dans les déplacements des habitants (nettement plus que la capitale « 65% »). A Béjaïa, 70% des personnes questionnées se déplacent par bus privés. Incontestablement, c'est le privé qui se taille la part du lion, éclipsant presque le secteur public qui y participe à moins de 2%. Présent en nombre (quelque 300 minibus exercent sur 29 lignes urbaines), le privé est attendu pour l'amélioration de la qualité de service dont pâtissent les usagers et dont l'écrasante majorité déplore le manque de sécurité, les arrêts trop longs et la cherté des prix. La voiture particulière n'est utilisée que dans près de 9% des déplacements dans la ville. Une part jugée moyenne par rapport à quelques autres grandes villes algériennes. 34% des ménages sont recensés comme disposant d'au moins un véhicule particulier avec néanmoins des disparités entre secteurs. On est, par exemple, plus équipé au niveau de l'arrière-port et du côté de l'université (Boukhiama) qu'au centre-ville, la rue de la Liberté et la zone industrielle. Le rapport de motorisation donne près de 50 véhicules pour 1000 habitants, moins que la capitale (83) mais nettement plus qu'à Annaba (32), Constantine et Oran (40). Le motocycle a, quant à lui, tendance à servir plus que le taxi. Près de 8 personnes sur 10 se déplacent pour aller travailler ou étudier, avec une prédominance nette pour la deuxième destination, au contraire des grandes agglomérations suscitées où les motifs obligés des déplacements sont partagés, plus ou moins équitablement, entre les deux destinations. L'essentiel des déplacements motorisés, principalement par les moyens de transport en commun, concerne en premier lieu le quartier populeux d'Iheddaden que l'on rejoint ou quitte à partir ou vers, notamment, le quartier de Sidi Ahmed et le centre-ville. Ces trois quartiers, ajoutés à la rue de la Liberté, comptent le plus gros de la population citadine. 491 ménages ont été interrogés à Iheddaden sur les 1560 dans la ville qui comprennent dans leur majorité entre 5 à 7 membres. Une taille des ménages jugée, par ailleurs, inférieure à celle des villes déjà enquêtées. La mobilité, tous modes confondus ( la marche y compris) est, par contre, plus accentuée à Boukhiama qu'ailleurs ; soit dans un quartier qui abrite une forte communauté estudiantine du fait de l'emplacement du campus et d'une cité universitaires. Cette zone enregistre aussi un flux d'échanges avec le reste de la commune tandis que les quartiers d'Iheddaden et de Sidi Ahmed comptent, eux, des déplacements, minimes, vers l'intérieur de la wilaya. Au milieu de ces habitudes de déplacement, un budget s'impose. Celui de transport qui ne diffère d'ailleurs pas trop d'un ménage « véhiculé » et de celui qui ne l'est pas. Chacun dépense, pour cela, une moyenne de 42 DA par jour avec, toutefois, une plus forte dépense pour les habitants de certains quartiers. Une moyenne qui reste bien inférieure à celle calculée en 2004 pour Alger, soit 100 DA par ménage algérois. Une histoire de tarification différente. Pourtant le prix d'une place dans un minibus de la ville de Béjaïa est passé, en l'espace de cinq années, et non sans un bouillonnement citoyen dans la rue, de 5 DA à 7 puis 10 et 12 DA. Bien que considérée « relativement basse » comparée à d'autres villes du pays, la dépense journalière donne un budget moyen, pourtant non négligeable, qui dépasse les 1800 DA/mois que débourse chaque ménage dans les transports collectifs. Des frais que l'on pourrait pourtant réduire si les usagers ne sont pas contraints à emprunter un deuxième bus pour se rendre dans l'un des endroits où une desserte directe n'est pas assurée. En revanche, il apparaît que ce sont les élèves et les étudiants qui dépensent le moins dans les transports en commun (bus, train et taxi...) avec une moyenne journalière de 34 DA du fait, sans doute, de la proximité des écoles d'où la possibilité des déplacements à pied, et du transport universitaire assuré (COUS).