Un hasard fortuit : la Journée nationale du chahid a été marquée dans un établissement scolaire de Blida - le lycée Mahi Mohamed - par la présence d'un ministre de la République française et pas des moindres, Azouz Begag, d'origine algérienne, précisément de Sétif. Venu en qualité de romancier, invité par la maison d'édition Sédia après la parution en 2006 du récit Un train pour chez nous, il poursuivra son périple par une visite à Sétif et à El Eulma. Au lycée où sera remarquée l'absence des enseignants de langue française, non invités à participer au petit débat autour du livre à l'intérieur de la salle de lecture de la bibliothèque, le ministre est heureux de répondre aux questions des lycéens pour qui il louera le bon niveau en histoire puisqu'ils connaissaient Martin Luther King et la Marche des beurs de 1983 en France. Le romancier, auteur notamment du célèbre Le Gône de Chaâba, dont le film fut un succès, fera un parallèle entre la misère de son enfance et celle des favelas du Brésil, celle des familles qu'il avait entrevues sur les bords de l'autoroute entre l'aéroport et Blida, celle des pays en voie de développement. Il n'hésitera pas à raconter des bribes de son enfance vécue à Lyon où « nos parents n'étaient que des numéros, des matricules, des mains bonnes pour construire la France dans les années cinquante et soixante alors que nos venues en Algérie durant les vacances permettaient aux parents de retrouver leurs origines et en même temps leur nom puisqu'ils étaient interpellés dans la rue par leur patronyme ». Aux questions posées par les jeunes, il aura surtout comme réaction celle de la volonté de construire des ponts entre les deux rives. « Je suis l'addition de deux cultures : j'étais algérien à la maison dans la banlieue lyonnaise et j'étais français à l'école. » Il montrera qu'il fut heureux un jour de voir des policiers arabes. « C'était la preuve que la France était aussi à nous et je n'avais plus de crainte en croisant des agents de police. » Il dira sa difficulté de s'assumer en étant enfant. « Il nous fallait un pays, une langue et une histoire et l'alchimie des séjours en Algérie durant les vacances et la vie en banlieue fut une richesse. Je me nourrissais aux deux sources des deux cultures. » M. Begag père dira son regret de ne plus voir les enfants rêver. « La télé ôte toute la part de l'imaginaire chez l'enfant qui ne rêve alors plus ». Il déclarera aux jeunes que le jeûne permet de réfléchir. « On mange trop et la faim a son côté positif puisqu'il y a un effort intellectuel. » Il louera même le Ramadhan. « J'ai été un enfant pauvre et j'aime bien les enfants qui se battent pour survivre ». Il révélera que la politique en France ne lui a pas donné de temps à consacrer à ses enfants et à l'écriture. « La vie politique est très violente et j'écris pour ne pas mourir d'un ulcère », dira-t-il. Il annoncera la prochaine sortie d'un livre : Azouz Begag ministre et incitera les jeunes lycéens à apprendre à cultiver l'ouïe pour « retrouver la richesse de la nature qui les entoure ». Le sentiment d'angoisse disparaît pour l'enfant Begag quand il venait en Algérie et sortait le soir. « On était connus et donc reconnus » et montrera qu'il ne répondait pas aux attaques des personnes qui lui déclarent qu'il est ministre parce qu'il est beur. Une équipe de cinéma suit le voyage du ministre dans le cadre de la préparation d'un documentaire sur les banlieues françaises, documentaire dont la sortie est prévue au mois d'octobre prochain. Le Gône de Chaâba est traduit en langue anglaise par Alec G. Hargreaves, de l'université de Floride aux USA et qui accompagnait le ministre à Blida. Juste avant la dédicace du livre aux jeunes comme Meroua, Raouf et Madina, et avant de recevoir des présents du directeur de l'éducation et du wali de Blida, M. Begag invitera les jeunes à soigner l'image de l'Arabe et du musulman dans le monde, une image négative.