Le chancelier allemand Gerhard Schröder effectue depuis hier une visite officielle de deux jours en Algérie à l'invitation du président Abdelaziz Bouteflika. Cette visite fait suite à celle effectuée par le Président algérien en avril 2001. Le chancelier allemand est accompagné d'une délégation gouvernementale et d'hommes d'affaires de haut rang. Cette nouvelle rencontre au sommet entre les deux pays sera marquée du sceau de la confiance retrouvée entre les deux capitales après le long intermède de la décennie noire du terrorisme qui avait dressé un mur d'incompréhension et alimenté un climat de méfiance pour la position de l'Allemagne vis-à-vis de la situation en Algérie. Les deux pays avaient fondamentalement divergé sur la notion des droits de l'homme. L'asile accordé par l'Allemagne à des responsables du parti dissous, qui n'avaient jamais caché leur soutien au terrorisme islamiste en Algérie, à l'instar de Rabah Kebir ou encore des deux fils de Abassi Madani, avait poussé les deux pays à se tourner le dos. Cette page de l'histoire semble aujourd'hui bien tournée. Les événements du 11 septembre ont certainement beaucoup contribué à faire prendre conscience aux Allemands du danger de l'intégrisme, d'autant que des activistes du commando qui avait perpétré les attentats des deux tours jumelles avaient séjourné en Allemagne avant de commettre leur forfait. Mais ces retrouvailles algéro-allemandes sont aussi et surtout empreintes du sceau du réalisme économique qui guide les investisseurs allemands, lesquels ont perdu le marché algérien au profit d'autres partenaires après avoir contribué dans une forte proportion à la mise en place du tissu industriel algérien dans les années 1970. Le déclic tarde pourtant à se produire pour passer du stade des bonnes intentions et des forums aux recommandations généreuses à celui de la concrétisation, et cela en dépit de la volonté politique qui existe entre les deux pays au plus haut niveau pour vaincre les résistances qui bloquent ou freinent la relance de la coopération bilatérale et l'empêchent de se hisser au niveau de l'excellence des relations politiques. Un signal fort avait été pourtant déjà donné par l'agence allemande de crédit et d'assurances Hermes en novembre 2002 en révisant à la baisse le risque Algérie. Le forum des hommes d'affaires algéro-allemand qui se voulait un cadre de réflexion et d'action pour nouer des relations d'affaires et de partenariat entre les deux parties n'est pas parvenu à créer cette dynamique souhaitée de part et d'autre, mais contrariée dans sa mise en œuvre par des considérations qui relèvent de la responsabilité partagée. L'environnement économique, commercial et financier, le climat des affaires en Algérie ne sont, certes, pas un modèle par rapport à ce que pourrait attendre et espérer un investisseur étranger soucieux de placer son argent en réduisant à sa plus simple expression la part du risque, mais il n'existe également nulle part de sécurité zéro en matière d'investissement. Pour ne pas l'avoir compris, les entreprises allemandes ont payé la facture de leur frilosité. Les chiffres confirment cette tendance à la décélération des relations économiques et commerciales. Le volume des échanges commerciaux entre les deux pays a connu, en 2004, une baisse substantielle, chutant de 879 millions de dollars en 2003 à 624 millions de dollars cette année. Les hydrocarbures ont constitué l'essentiel des importations allemandes d'Algérie suivis dans une proportion négligeable de produits sidérurgiques. L'Algérie importe d'Allemagne des produits alimentaires et industriels, des produits pharmaceutiques, des équipements d'optique... La présence parmi la délégation allemande de nombreux hommes d'affaires et de banquiers pourrait constituer une heureuse opportunité pour les deux pays afin de renforcer et d'élargir davantage cette coopération à d'autres domaines. L'expérience réussie du partenariat dans le secteur des détergents entre les entreprises Henkel et l'Enad et l'intervention d'entreprises allemandes dans le projet de réalisation du métro d'Alger pourraient créer un effet d'entraînement auprès des investisseurs des deux pays, notamment dans le secteur de la PME-PMI pour élargir le champ de la coopération bilatérale. La société civile a déjà tracé la voie par le canal des fondations comme la Fondation Friedrich Eebert ou encore la Fondation Konrad Adenauer qui ont contribué, par des actions ciblées, à tisser des liens d'amitié et de coopération entre les deux peuples. Les politiques sont également aujourd'hui au rendez-vous. Le terrain est plus que jamais balisé et propice aux hommes d'affaires pour donner un contenu plus concret à la coopération bilatérale.