Le directeur général des « élections et des Libertés » au ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales, Saïd Zerrouki, est intervenu hier sur les ondes de la radio Chaîne III sur les conditions de préparation des prochaines élections législatives, à la suite de la convocation du corps électoral pour le 17 mai prochain par le président de la République. Une des questions abordées par le représentant du ministère de l'Intérieur avec l'animatrice de l'émission quotidienne du matin de la radio, « l'invité de la rédaction », avait trait aux critères d'éligibilité et plus précisément au fait de savoir comment les autorités se préparent-elles à appréhender d'éventuelles candidatures de repentis impliqués dans des affaires de terrorisme et ayant une responsabilité politique ou autre dans les événements tragiques vécus par notre pays. D'anciens responsables politiques du parti dissous relayés par des chefs terroristes qui ont déposé les armes n'ont pas caché, dans de multiples déclarations, leur intention de reprendre du service, forts en cela de l'argument juridique selon lequel la charte sur la réconciliation nationale leur a fait recouvrer tous leurs droits civiques et politiques. C'est là, bien évidemment, une lecture étriquée des dispositions de la charte sur la réconciliation nationale qui exclut de manière claire et ferme les candidatures d'anciens militants du parti dissous qui sont à l'origine des dérives graves qu'a connues l'Algérie. M. Zerrouki a d'ailleurs fort opportunément rappelé à cet effet cette disposition de la loi que les anciens dirigeants du parti dissous et les milieux politiques qui leur sont apparentés tentent de contourner en recourant à la surenchère politique et à d'autres astuces procédurières pour tenter de valider leurs candidatures. L'un des moyens le plus conventionnel est le parrainage des candidatures qui pourraient émaner des rangs de ce courant par des listes partisanes ou des listes (faussement) indépendantes. Des partis politiques, par conviction ou par calculs électoralistes, pourraient être amenés à ouvrir leurs bras aux candidatures émanant de ce courant pour capter l'électorat et les sympathisants de ce courant ou ce qu'il en reste. Les commissions de candidature qui examineront les dossiers de candidature seront particulièrement vigilantes pour débusquer les candidats ne réunissant pas les critères d'éligibilité énoncés par la loi électorale et les dispositions de la charte sur la réconciliation nationale, a rassuré le représentant du ministère de l'Intérieur. Mais on sait par expérience que chez nous il y a toujours les textes et le contexte. Si au plan politique et réglementaire les choses ne souffrent aucune équivoque, il demeure qu'au plan pratique, la faisabilité d'un tel scénario pose un sérieux problème. Comment, en effet, l'Administration pourra-t-elle disqualifier un candidat jugé inéligible et lui faire appliquer les dispositions de la charte sur la réconciliation nationale si la situation juridique et pénal de ce même candidat n'est pas dûment assainie ? Si la justice n'a pas été saisie sur son cas pour le condamner ou l'innocenter ? Il n'y a que la justice qui est habilitée à déchoir un citoyen de ses droits civiques et politiques. Pour n'avoir pas pris à bras-le-corps ce dossier épineux par manque de courage politique ou par calcul, pour ne pas compromettre l'opération de repentir, les autorités reçoivent aujourd'hui à la face le retour du boomerang. C'est dire combien est difficile et complexe la tâche qui attend les commissions locales de candidature. Nul doute que cette bombe à retardement s'invitera dans le débat préélectoral qui s'ouvrira dans les prochaines semaines. Le tout est de savoir sous quelles formes. Et si le prochain scrutin ne porte pas en lui tous les ingrédients d'une élection à haut risque.