Si les activités commerciales informelles et l'existence de marchés parallèles constituent, pour l'heure, l'essence du débat sur l'économie nationale et les préjudices qui lui sont causés, il ne demeure pas moins que ces activités « au noir » causent d'autres dégâts qui sont cette fois-ci d'ordre social. En effet, le commerce informel emploierait plus de 3 millions de personnes, qui évidemment n'ont pas accès à certains « avantages sociaux » comme l'affiliation aux caisses d'assurances ou encore des rémunérations selon le SMIG. En revanche, l'entrée en force des catégories jeunes, notamment les mineurs, est de plus en plus perceptible depuis quelques années. Ce phénomène qui devient de plus en plus inquiétant est dû essentiellement à deux causes : les pénibles conditions sociales de milliers de familles algériennes et l'échec scolaire qui leur est subséquent. Ces deux facteurs font que les jeunes cherchent de plus en plus à travailler à des âges très bas, afin de subvenir aux besoins de leur famille ou encore pour satisfaire leurs propres besoins. L'exemple le plus éloquent est l'exploitation abusive dont sont victimes des centaines d'adolescents au niveau des cafés ou récemment certains fast-foods qui préfèrent de plus en plus recruter des éléments jeunes, ce qui représente une main-d'œuvre bon marché. Certains de ces employés ont bien daigné nous éclairer sur les raisons qui les ont poussés à se laisser ainsi exploiter, puisque le plus chanceux d'entre eux touche au mieux 6000 DA pour 10 heures de travail. A. Hacène qui travaille comme pizzaïolo au niveau d'une pizzeria au centre-ville, nous confia que pour ses préparations il était « obligé de supporter toute la chaleur qui se dégage du four. Parfois, j'ai l'impression d'étouffer. Tout cela pour un salaire de misère. » Idem pour d'autres adolescents qui travaillent au niveau des cafés de la ville. Les cas les plus ahurissants sont à chercher du côté de certains chantiers de construction où les petits sont de plus en plus nombreux à donner « un coup de main » à leurs aînés, très souvent pour des clopinettes. C'est le cas de Merouane, 17 ans, qui se lève chaque jour à 5 h et s'en va « pointer » à un endroit connu de quelques initiés seulement. « Il y a quelques entrepreneurs qui viennent parfois nous chercher pour nous emmener sur des chantiers pour y travailler à 500 DA la journée. Nous ne bossons jamais plus de trois jours au même endroit, à cause des contrôles. Nous savons que nous sommes exploités, mais nous n'y pouvons rien. Il faut bien se nourrir », conclura notre interlocuteur ce funeste tour d'horizon, hélas non exhaustif.