Pendant longtemps, le discours sahraoui se faisait prudent, se faisant même violence alors que la situation exigeait la plus grande clarification. C'est-à-dire appeler les choses par leur nom et dire qui est qui et qui fait quoi, dans l'occupation du Sahara-Occidental par le Maroc. Et qui aussi bloque le processus de paix de l'ONU et tente de fourvoyer la communauté internationale dans de pseudo-solutions. Sentant probablement que la situation ne s'accommode plus de discours conciliant au seul détriment du peuple sahraoui, le ministre délégué sahraoui pour l'Europe, Mohamed Sidati, a dénoncé, dans une lettre adressée samedi à l'Union européenne, l'attitude de la France et de l'Espagne qui vise, souligne-t-il, à « légitimer l'annexion et l'occupation » par le Maroc des territoires sahraouis. Le Front Polisario considère « hautement injustifiable » que la France ait décrit le projet marocain d'autonomie comme « constructif » et accuse l'Espagne de faire montre de « mauvais gré » dans la recherche d'une solution juste au Sahara-Occidental, ajoute la lettre. S'agissant de la réaction française, M. Sidati se demande « ce qui peut bien être – constructif – dans un projet visant à légitimer l'annexion et l'occupation illégales d'un territoire non autonome et de priver un peuple colonisé de son droit internationalement reconnu et inaliénable à l'autodétermination ». Quant à l'Espagne, a-t-il déploré, « au lieu d'assumer ses responsabilités historiques, juridiques et politiques » envers le Sahara-Occidental et son peuple, elle a « montré une nouvelle fois son mauvais gré à contribuer de manière positive » à la résolution du conflit. En outre, en « décidant de réarmer l'armée marocaine par la fourniture d'un ensemble important d'équipements militaires », le gouvernement espagnol « vient de montrer clairement son engagement actif du côté marocain » en « contradiction totale avec ses protestations publiques de neutralité » dans le conflit sahraoui. M. Sidati « s'étonne » de voir certains membres de l'UE « nager à contre-courant des normes internationalement reconnues de défense des droits humains fondamentaux », estimant que ces pays « doivent être conscients que le fait de récompenser le Maroc pour son annexion illégale et persistante du Sahara-Occidental ne conduira jamais à la paix juste et durable que nous désirons tous, mais bien plutôt à un accroissement des tensions dont les conséquences peuvent mettre en danger la stabilité de la région toute entière ». Rejetant dans la forme et le fond le projet d'autonomie marocain, le ministre sahraoui appelle l'Union européenne à « montrer tous les signes d'un engagement actif dans l'effort international pour trouver une solution pacifique, juste et durable au conflit du Sahara-Occidental ». La paix au Sahara-Occidental « passe nécessairement par la mise en œuvre d'un référendum d'autodétermination » et à partir de cette solution durable sur le territoire sahraoui, l'ensemble des peuples de la région pourra progresser sur la voie de l'intégration et du développement politique et économique, lesquels favoriseront la stabilité de l'Afrique du Nord, mais aussi de l'aire méditerranéenne toute entière, conclut le ministre sahraoui. Rappelons que le président sahraoui avait récemment interpellé le chef de l'Etat français justement après ses déclarations sur le projet marocain que les autorités sahraouies ont, en ce qui les concerne, déclaré nul et non avenu. Ce n'est pas la première fois que le Maroc tente de contourner la légalité internationale. En vain jusque-là.