Les dirigeants du Front Polisario mènent actuellement à travers le monde l'une, sinon leur plus grande offensive diplomatique, afin de sensibiliser l'opinion internationale sur la situation que vit le peuple du Sahara-Occidental et anticiper de la sorte sur les prochaines échéances. Même si le combat n'a jamais connu le moindre répit, il existe cette fois une conjonction de facteurs qui retiennent l'attention. Il s'agit successivement du rapport de la mission des droits de l'homme de l'ONU dans les territoires sahraouis occupés, avec le contenu accablant pour l'occupant marocain, le refus de Rabat d'autoriser une visite sur place de députés européens, l'élection d'un nouveau secrétaire général des Nations unies, la réunion actuellement de la Commission de décolonisation de cette même organisation et avant la fin de ce mois, la réunion ordinaire du Conseil de sécurité sur ce conflit avec à la clé un nouveau rapport – le dernier en fait – du secrétaire général sortant Kofi Annan. C'est donc l'offensive relayée à l'extérieur par certaines actions, alors que sont mises en évidence des accusations de partialité, voire de franche complicité avec l'occupant marocain. A ce sujet, des parlementaires américains ont, dans une lettre à la secrétaire d'Etat US Condoleezza Rice, pointé du doigt la France opposée, faisaient-ils remarquer, à une extension du mandat de la force de l'ONU aux droits de l'homme. Mais l'Amérique ne se montre pas plus déterminée, alors même qu'il y a occupation par la force et violation massive des droits de l'homme. Ou encore l'Espagne, l'ancienne puissance occupante, pressée par les Sahraouis de s'acquitter de sa dette envers eux, elle qui avait cédé leur territoire à un autre occupant. « Déni de justice » Profitant de ce contexte, le président de la RASD (République arabe sahraouie démocratique), Mohamed Abdelaziz, a émis le vœu de voir le nouveau secrétaire général des Nations unies, le Sud-Coréen Ban Ki Moon, réussir à organiser un référendum « libre et démocratique » pour l'autodétermination du peuple sahraoui, et ce, « dès le début de son mandat ». M. Abdelaziz s'est dit convaincu que le nouveau secrétaire général de l'ONU « œuvrera à trouver une solution juste à la question sahraouie comme l'avait fait son prédécesseur Kofi Annan qui était parvenu à régler la question du Timor Oriental et ce, a-t-il dit, en dépit de l'entêtement du gouvernement marocain ». Après avoir rappelé que « 70 Etats dans le monde ont reconnu la République sahraouie et établi des relations diplomatiques avec elle », le président sahraoui a souligné « le consensus mondial qui existe sur le fait que le Front Polisario est le représentant unique et légitime du peuple sahraoui », précisant que « la question sahraouie est une question de décolonisation » et qu'il n'existe « aucun Etat dans le monde qui reconnaisse la souveraineté du Maroc sur les territoires sahraouis ». Par ailleurs, M. Abdelaziz a dénoncé les violations flagrantes des droits de l'homme dans les territoires sahraouis par l'administration marocaine, ajoutant que « l'occupation marocaine du Sahara-Occidental a été dénoncée par la quatrième commission de l'Assemblée générale des Nations unies ». Cette réunion ordinaire a été précédée par la publication du rapport du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) sur le Sahara-Occidental lequel, a souligné le Front Polisario, a « mis en lumière les exactions marocaines » et le « déni de justice », dont est victime le peuple sahraoui. La commission du HCDH, qui a élaboré le rapport après une visite dans les territoires occupés du Sahara-Occidental en mai dernier, « a mis en lumière les violations des droits de l'homme commises par le Maroc », a déclaré le coordinateur du Front Polisario avec la Mission de l'Onu pour l'organisation d'un référendum au Sahara-Occidental (Minurso), Mhamed Khaddad. Le rapport du HCDH affirme, rappelle-t-on, que l'autodétermination est un « droit fondamental » du peuple sahraoui, qui doit en jouir « sans plus de retard ». Et dire que certains Etats et organisations, qui se proclament défenseurs des droits de l'homme, se montrent absolument sourds, substituant à cette question leurs intérêts, comme ce fameux accord de pêche. Ce qui n'occulte pas certaines responsabilités historiques, rappelées par le délégué du Front Polisario en Espagne, Brahim Ghali, qui a affirmé que le peuple sahraoui ne doit pas être l'éternelle victime de l'étape de la transition en Espagne et appelé ce pays à s'acquitter de sa dette morale, historique, politique et juridique envers le peuple sahraoui. Cela bien entendu, en référence aux accords tripartites de Madrid de novembre 1975, signés par l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie, alors que le général Franco agonisait. La défense de la légalité internationale n'est pas sélective. La défense de la légalité internationale doit s'appliquer aussi au peuple sahraoui, a-t-il souligné. Le Sahara-Occidental n'est pas un problème interne du Maroc pour que Rabat propose une autonomie. Cela revient à fausser la nature du conflit, et la doctrine des Nations unies en la matière est parfaitement connue, a-t-il conclu. Refus du Quai d'Orsay Participant elle aussi à cette offensive, le défenseur sahraoui des droits humains, Mme Aminatou Ali Ahmed Haidar, a déclaré jeudi garder beaucoup d'espoir à l'issue de ses entretiens au Sénat français sur la situation au Sahara-Occidental. « Je garde beaucoup d'espoir parce qu'ils se sont engagés pour la cause sahraouie, pour le respect des droits humains au Sahara-Occidental et surtout des droits du peuple sahraoui à son autodétermination, pour l'application d'un référendum qui mette fin à cette souffrance », a déclaré Mme Haidar, à l'issue d'un entretien avec le sénateur Robert Bret, vice-président du groupe communiste au Sénat. « Je suis contente de cette rencontre », a-t-elle ajouté, indiquant que les sénateurs ont l'intention de faire pression sur le gouvernement français pour replacer la cause sahraouie dans ses justes dimensions en tant que question de décolonisation. Ils se sont en outre engagés d'écrire une lettre de protestation au gouvernement français « pour avoir refusé » de la recevoir, a-t-elle poursuivi. Elle a indiqué que c'est l'ONG Amnesty international qui avait fait les démarches pour que le ministère français des Affaires étrangères la reçoive en tant que défenseur des droits humains. « Vous pouvez me tuer, jamais vous ne tuerez mes idées », est la ligne de conduite de cette combattante des droits humains qui a rappelé que ces répressions touchent l'ensemble du peuple sahraoui qui compte plus de 500 disparus depuis 1975, lorsque le Maroc avait envahi le Sahara-Occidental. Elle a ajouté que les autorités marocaines retiennent actuellement 33 prisonniers politiques, en grève de la faim. Occupation par la force, déni de justice et violation des droits de l'homme constituent ainsi les éléments majeurs de cette offensive. Des éléments qui ne sont pas inconnus pour tous les Etats. Il s'agissait pour les responsables sahraouis de le rappeler.