Personnage de légende, Antonio Stradivari, plus connu sous le nom de Stradivarius, est lié à un métier, la lutherie, et à un instrument, le violon. Pas n'importe quel violon, car depuis des siècles le Stradivarius est un mystère non élucidé en ce qui concerne ses secrets de fabrication que le maître artisan italien avait gardés secrets. Un documentaire allemand de 2007, diffusé sur Arte, s'attache à l'actualité de Stradivarius dont les violons qui ont traversé les siècles font l'objet de convoitises lors de ventes aux enchères où la valeur de chaque instrument peut atteindre les deux millions de dollars. Le nombre de Stradivarius encore en circulation dans le monde est évalué à près de 650 violons. Stradivarius en aurait construit un millier. Sa formidable aventure humaine et professionnelle se poursuit donc à travers les âges. Antonio Stradivari est né en 1644, dans la ville italienne de Crémone. Par une extraordinaire conjonction du hasard, cette ville se trouvait être alors la capitale mondiale de la lutherie sous l'impulsion d'une famille qui avait fait le renom de cette discipline, la famille Amati. La vie des Amati se confondait en fait avec la fabrication des instruments à cordes. La famille Amati détient le privilège d'avoir, la première, construit le violon dans ses lignes modernes en transformant la viole, devenue alors instrument archaïque par rapport à une demande exigeante des musiciens de l'époque. La chance de Stradivarius fut sans nul doute d'être né dans la proximité de cette famille d'artisans chevronnés. Ces derniers exerceront, depuis l'apparition d'Andréa Amati, les métiers de la lutherie de père en fils, constituant ainsi une espèce de dynastie dans cette profession. Cela leur vaut de recevoir, à Crémone, de nombreux jeunes désireux d'apprendre chez eux les rudiments du métier. Au nombre de ceux-là figure un futur maître luthier, Andréa Guarneri, qui sera l'élève de Nicolo Amati à partir de 1541, alors que Stradivarius n'est pas encore né. Ce détail est essentiel, car le label Guarneri a été longuement concurrent du Stradivarius. Aujourd'hui encore, les violons et violoncelles construits par Andréa Guarneri — il en subsisterait plus de 200 —continuent d'être recherchés par les grands solistes du violon. André Guarneri n'aura pas eu le temps de développer davantage son industrie, car il meurt en 1698 à l'âge de 72 ans dans la ville de Crémone. Sa disparition marque l'émergence d'Antonio Stradivari qui lance sur le marché de la lutherie des instruments prodigieux qui fascineront l'Italie, puis l'Europe, avant de faire la conquête du monde. Le talent de Stradivarius ne se bornait pas à construire des violons et des violoncelles. Il avait commencé par changer le volume et la structure de ces instruments qui, sous ses doigts, atteignaient le summum de l'esthétique. La révolution de Stradivarius impliquait que le maître luthier avait acquis une maîtrise absolue des mathématiques, de l'ergonométrie et, plus que tout, des ressources de la nature. Les experts sont unanimes, à ce jour, à défendre la thèse que le mystère des violons de Stradivarius ne sera percé que lorsque le matériau qui a servi à leur fabrication aura été identifié. Toutes les tentatives dans cette direction se sont avérées vaines. Et il y a certes de quoi être perplexe, car les Stradivarius, chacun étant unique dans son genre, expriment d'abord une image de modernité pour qui les regarde alors qu'ils existent depuis plus de trois siècles. D'où vient alors l'extraordinaire cachet de ce violon qui est plus grand, plus beau et plus fort que tous les autres, si l'on excepte quelque peu ceux de Guarneri ? Stradivarius s'est bien gardé de divulguer ses recettes. Il est permis de croire que cette alchimie inimitable, il en avait puisé les formules à partir de sa fréquentation des forêts de Crémone où il avait, seul, repéré le bois précieux dont sont faits les Stradivarius. Les techniques les plus avancées d'investigation ne sont pas parvenues à lever le voile sur ces formidables créations qui donnent la mesure du génie humain. Antonio Stradivari ne quitta jamais Crémone où il mourut en 1737 à l'âge très avancé de 93 ans, à cette période où l'espérance de vie était limitée. Stradivarius donna le meilleur de lui-même entre 1700 et 1720, années durant lesquelles il parvint au sommet de son art.