Le Ramadhan est à peine entamé que plusieurs citoyens appréhendent déjà le tapage nocturne, le commerce illicite et les rôtisseries aux quatre vents. L'expérience des années précédentes ayant prouvé l'incapacité des services concernés de mettre fin à cet état de fait, les populations des cités et des grands quartiers redoutent déjà le quotidien qui se prépare en grande pompe par des apprentis commerçants qui vont envahir les moindres recoins du périmètre commercial. Ainsi, depuis quelques jours, plusieurs magasins se sont reconvertis en commerce de pâtisseries orientales où la zlabia tient le haut du pavé. Sans aucune norme d'hygiène, les bidons d'huile et les kilos de sucre déversés dans des poêlons crasseux laissent filer des odeurs nauséabondes qui s'infiltrent allègrement à travers les persiennes, rendant la vie insoutenable pour le voisinage immédiat. Le soir venu, c'est les brochettes qui vous empoisonnent la vie. En effet, depuis quelques années déjà, le phénomène de la brochette a pris une ampleur telle que chaque quartier s'est cru obligé d'avoir sa propre rôtisserie. Barbecue en plein air, des morceaux de viande d'une qualité douteuse exposés sur des cartons ou tout simplement sur une table improvisée où se mélangent chiffons, boîtes de conserve et sachets de sel repoussants, de petites broches graisseuses et l'inévitable boîte de « chema » pour vous accompagner. Un spectacle désolant qui se déroulera quotidiennement sous nos yeux sans qu'aucune autorité puisse faire quoi que ce quoi. Et pour agrémenter ces soirées de saltimbanques, des cassettes, tous décibels dehors, à vous crever les tympans, vous sont proposées jusqu'au petit matin. Une véritable anarchie à ne pas mettre exclusivement sur le dos du mois sacré, mais tout simplement sur cette indifférence qui habite tout un chacun. Ramadhan, appellé à tort mois de « tous les permis », est devenu une période où la fatigue atteint son summum, alors que dans un passé récent, c'était la période la plus attendue par tous. Mais comme les temps changent, il n'y a pas lieu de s'étonner de ces tournures qui vous font perdre les repères sacrés.