Le Parlement chinois a adopté une loi sur la propriété privée et relevé la taxe professionnelle pour les sociétés étrangères, hier, au terme de deux semaines de débats rythmés par les préoccupations relatives à l'écart de richesses entre villes et campagnes et l'environnement, rapporte l'agence Reuters. L'Assemblée nationale populaire, qui tenait sa session annuelle, a entériné sans surprise les lois sur la propriété et l'impôt sur les entreprises, ainsi que le budget 2007, à une écrasante majorité. Seuls 52 délégués sur près de 3000 ont voté contre la loi sur la propriété et 37 se sont opposés à celle sur la taxe professionnelle. Le Premier ministre Wen Jiabao avait déclaré dans son discours d'ouverture que les grands thèmes de la session annuelle porteraient sur les économies d'énergie, la lutte contre la pollution et l'augmentation des dépenses au profit de la campagne, où sont recensées de plus en plus de manifestations de colère sociale. Il a repris et développé ces thèmes lors de sa conférence de presse annuelle, estimant que le Parti communiste devait s'attacher aux groupes sociaux laissés de côté par le boom économique chinois, les paysans en particulier. « Les priorités aujourd'hui sont de promouvoir l'égalité dans les opportunités d'éducation, d'adopter des politiques d'emploi progressives, de réduire les écarts de revenu et de construire des réseaux de sécurité sociale couvrant à la fois les villes et les campagnes », a-t-il dit. Le chef du gouvernement a parallèlement souligné la nécessité d'améliorer la qualité des entreprises cotées en Bourse et l'administration des marchés de capitaux, alors que les valorisations des actions chinoises sont supérieures aux niveaux internationaux, ce qui fait craindre la formation d'une bulle spéculative. « Je prête attention au développement du marché boursier, mais je prête encore davantage attention à la santé du marché boursier », a-t-il déclaré. M. Wen a réaffirmé la volonté du gouvernement de mettre en place une nouvelle agence chargée d'investir une partie des gigantesques réserves de changes du pays, les plus fortes au monde, qui s'élèvent à plus de 1000 milliards de dollars. Aucune loi n'a jamais été rejetée par le Parlement chinois, mais la loi sur la propriété a suscité un débat inédit, subissant un record de sept relectures avant d'être retirée de l'ordre du jour de la session annuelle l'année dernière. Elle vise à renforcer la protection des détenteurs d'actifs privés et à restreindre les expropriations illégales. Mais selon ses détracteurs, elle porte le risque de renforcer les inégalités sociales et entre en contradiction avec les principes socialistes. La loi protège mieux les actifs d'entreprises, mais prévoit peu pour les agriculteurs, dont les terres détenues collectivement sont toujours exposées au risque d'expropriation par les autorités locales et ne peuvent être utilisées comme garantie pour l'obtention d'un prêt. Et même si M. Wen a annoncé une hausse de 15,3% des dépenses budgétaires pour les zones rurales, le financement pour le développement des campagnes augmentera à un rythme légèrement moindre que celui du budget global et nettement inférieur à la hausse de 17,8% des dépenses militaires. La loi sur la taxe professionnelle met fin au traitement préférentiel dont bénéficiaient jusqu'ici les sociétés étrangères en instaurant un taux unique de 25%. Les analystes estiment toutefois que cette mesure ne devrait guère dissuader l'investissement étranger direct. Moins que par les impôts, les sociétés étrangères sont avant tout préoccupées par la nécessité d'une meilleure transparence des règles du jeu économique. Avec cette modification, les autorités comptent augmenter les recettes de l'Etat de plusieurs milliards de dollars chaque année. Cette uniformisation fiscale était prévue dans le cadre de l'adhésion de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce, fin 2001. Par ailleurs, l'organisation américaine Human Rights Watch a déclaré que la session parlementaire avait été marquée en parallèle par une répression accrue contre les dissidents et par une hausse des assignations à résidence. Plus de 700 signataires d'une pétition qui avaient fait le voyage de Pékin pour réclamer des mesures contre les abus des autorités locales ont été interpellés et renvoyés de force chez eux. Il s'agit, selon l'ONG, d'une des opérations de police les plus vastes depuis des années. L'absence de l'ancien chef du parti à Shanghai, Chen Liangyu, a été dûment notée. Ce dernier est impliqué dans un scandale de détournement de fonds d'aide sociale.