L'Algérie politique a connu, encore ce week-end, un activisme accru au grand amusement des citoyens électeurs qui (re)découvrent des partis qui semblent s'être réveillés de leur long coma. Saïd Sadi défendait les couleurs du RCD à la radio, Moussa Touati haranguait ses troupes à la salle Harcha, Ali Boukhezna, chef du fameux MEN devant accueillir les repentis, plaidait sa cause à Tizi Ouzou, Belkhadem réunissait hier à Alger un conclave pour tirer les listes au clair… La scène politique s'emballe, à se fier à cette soudaine agitation préélectorale. Plus que tout autre scrutin, les législatives font assurément saliver le personnel politique algérien quel que soit le sigle où il émarge. Non pas que cette élection présente quelque enjeu politique pour le pays d'abord et pour le parti ensuite, mais simplement pour les privilèges et le statut social qu'elle confère aux futurs députés. Le fait est que cette éphémère effervescence partisane, qui donne un semblant de relief à une vie politique linéaire, est dépouillée d'un débat d'idées sur les projets de société qui auraient pu éclairer l'opinion. Souvent, le discours qui fait office de campagne chez nous évolue au ras des pâquerettes, loin, très loin des préoccupations du citoyen électeur. Il est loisible de relever la « haute facture intellectuelle » du discours politique ambiant centré sur de honteuses combines et aux autres marchandages de strapontins au sein des états-majors de certains partis. Ou encore sur ces ministres qui font du forcing pour trôner en haut de la liste de leurs partis de peur de quitter les délices du pouvoir. Louisa Hanoune nous a appris ainsi qu'un patron lui a proposé un milliard de centimes moyennant le pilotage du PT dans son douar ! Et des exemples comme cela se comptent par dizaines, notamment chez les « micro partis » qui sont là juste le temps d'une élection avant de reprendre un autre business… Marchands de voix... Même le puissant FLN, qui règne sans partage sur toutes les assemblées, n'est pas indemne de ces pratiques qui souillent la politique en Algérie. Les élections sénatoriales auront du reste étalé sur la place publique ce « marché de voix » hideux ouvert au niveau des kasmas et des mouhafadhas de ce parti. Son secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem, a certes promis de lutter contre « les faussaires », mais cela apparaît comme de la poudre aux yeux, tant ce type de commerce est consubstantiel au système politique algérien, dont le FLN est le maillon fort. Un système où la promotion sociale et politique résulte moins d'une quelconque épaisseur intellectuelle et d'un savoir-faire avéré que de la corruption et de la tricherie. Dans beaucoup de partis politiques en Algérie, il n'est pas spécialement payant d'être bardé de diplômes ou d'avoir roulé sa bosse sur le terrain des luttes politiques, sociales et économiques, pour espérer se faire adouber par les siens en guise de reconnaissance. Le pouvoir de l'argent que le génie populaire a désigné par la « ch'kara » (le sac d'argent) a achevé de disqualifier la politique globalement et dans le détail. C'est pourquoi les meetings et autres harangues des leaders politiques à la veille des élections ressemblent en Algérie à de pathétiques plaidoiries pour des causes perdues d'avance. Les politiques ont du mal à capter l'intérêt de l'Algérien « basique » qui ne comprend plus leur langage à force d'être dupliqué. Il est significatif de souligner le fléchissement inexorable du taux de participation des Algériens, y compris l'élection présidentielle. Au moins 45% du corps électoral ont signé leur divorce d'avec l'acte de voter. A quoi bon ! semblent crier ces Algériens lassés d'attendre pour rien. Les prochaines législatives n'échappent pas à la désaffection populaire quand bien même les partis tentent de meubler le vide sidéral du débat politique par des promesses à l'emporte-pièce. Le foisonnement annoncé des listes d'indépendants est un indice probant de la faillite des partis mais aussi de ce sentiment largement partagé qu'un mandat de député vaut tous les sacrifices. Même les plus vils…