Enlisé dans ses positions trop dures et trop tranchées, ce parti tente un discret come-back avec, en ligne de mire, les élections du 10 octobre prochain. Le RCD a réuni ce week-end son conseil national, plus haute instance entre deux congrès. Cette rencontre est intervenue à un moment charnière de la vie politique, sécuritaire et économique dans le pays. Il était, donc, clair que beaucoup de regards seraient rivés sur ce qu'allait donner un pareil événement. Le RCD, en effet, donne l'air de vouloir aller droit dans le mur à cause de ses nombreux «égarements» qui ont grandement réduit sa popularité dans ses fiefs classiques que sont certaines régions de Kabylie et même quelques communes de la capitale. L'entrée au gouvernement de ce parti, censé être un des principaux porte-étendards de l'opposition, semble lui avoir été fatale. Beaucoup d'observateurs, d'anciens militants de ce parti et d'alliés «objectifs» ne se gênent pas pour lui rappeler qu'il lui a fallu 11 longs jours après l'assassinat du jeune Massinissa Guermah avant qu'il ne se décide, enfin, à quitter le gouvernement. Un gouvernement avec lequel il était forcément solidaire et qui, comme le disait le RCD lui-même, avait tiré sur de jeunes manifestants sans défense. Les purges, qui ont eu lieu au sommet du parti, n'étaient pas là pour arranger les choses. Bien au contraire. Peu de militants de la base, en effet, ont compris la terrible cabale médiatico-politique dont avait été victime Khalida Messaoudi avant que le parti n'ordonne son expulsion alors qu'elle en est une des principales figures de proue. Amara Benyounès, un autre grand artisan de la formation du Dr.Sadi, devait connaître le même sort quelques mois plus tard. Là encore, bien mal en serait celui qui pourrait expliquer les raisons de cet acharnement mis à liquider tous les éléments pouvant faire de l'ombre au seul et unique leader d'un parti prônant vertement la démocratie et où, pourtant, le débat contradictoire est strictement banni. Est-il besoin de rappeler, à ce sujet, que d'autres illustres figures ont connu le même sort il y a de cela plusieurs années, à l'égal de Ferhat Mehenni et de Mokrane Aït Larbi. Il est même probable que Matoub aurait subi le même sort s'il n'était pas mort entre-temps. D'où, entre autres, l'acharnement qu'apporte la famille du défunt à incriminer le parti de Sadi dans l'assassinat du Rebelle. Le conseil national de ce week-end a confirmé la tendance en officialisant l'exclusion de deux autres membres, Zanoune, responsable de l'organique au niveau d'Alger, et Ould Ali El-Hadi, patron du MCB Coordination, transformé par le RCD, avec le soutien du pouvoir, en RCD tout court afin de dénier le droit d'existence aux deux autres tendances représentant ce mouvement. Cette seconde exclusion, la plus grave sans doute, grève très lourdement le parti et l'éloigne un peu plus du mouvement citoyen au niveau de la Kabylie. Des sources proches de la direction nationale de ce parti, ce qu'il en reste du moins, nous ont affirmé que «cette purge vise à assainir les rangs de la formation et à repartir de pied ferme». Loin d'être convaincants, ces arguments prouvent, au contraire, toute la détresse de cette formation politique. Le RCD, donnant l'air d'être fortement préoccupé par la crise organique qui menace de le faire voler en éclats un jour, ne subordonne sa participation aux futures échéances électorales qu'au règlement ou pas de la crise en Kabylie suivant le contenu du programme du gouvernement. Ce parti, qui a joué un rôle prépondérant dans l'interruption du processus électoral en 91 et qui a pris une part très active dans la lutte antiterroriste a observé un silence étrange, peut-être gêné, par rapport au procès qui a opposé à Paris Nezzar à Souaïdia et qui s'est transformé, comme il fallait s'y attendre, en procès de la plupart des figures de proue, militaires, civiles et politiques, du plan d'éradication de l'islamisme politique en Algérie et qui a si lamentablement échoué. Le RCD, qui doit tenter désespérément de se replacer sur l'échiquier politique suivant les nouveaux rapports de force intervenus au sommet du pouvoir, ne dénonce que très sommairement l'actuelle recrudescence terroriste. De plus en plus d'observateurs s'accordent même à dire que le patron incontestable du RCD chercherait même le meilleur moyen d'annoncer en temps opportun sa participation aux prochaines élections locales afin de supplanter le FFS et le mouvement citoyen de Kabylie. A moins que le RCD ne prévoit d'effectuer l'opération inverse, c'est-à-dire boycotter le vote au cas où le FFS déciderait de participer et tenter, par tous les moyens, de maintenir la région dans son isolement qui l'amène imperceptiblement vers une autonomie qui n'ose pas encore dire franchement son nom.