Abdelhamid Mehri et Chawki Mostefaï ont animé, hier, une conférence à la maison de la culture de Boumerdès portant sur les accords d'Evian et l'Indépendance de l'Algérie à l'occasion du 50e anniversaire du cessez-le-feu entre Français et Algériens qui a consacré l'indépendance de notre pays. Mehri est revenu longuement sur la conjoncture dans laquelle ont eu lieu ces négociations, disant qu'elles ne se sont pas déroulées dans un climat favorable. « Au contraire, la tension régnait partout. Surtout que la France avait tenté de nous créer des problèmes de frontières avec nos frères et voisins marocains, tunisiens et libyens lorsqu'elle a senti que la lutte aboutissait inévitablement à l'indépendance », a dit Mehri. L'ex-secrétaire général du FLN a ensuite retracé les moments forts de la Révolution algérienne en rapport direct avec les accords d'Evian : le rejet du triptyque de Guy Mollet (arrêt des combats d'abord, le vote des représentants des Algériens ensuite, et le dialogue enfin), le rejet de la « paix des braves » de De Gaulle, et le rejet du cessez-le-feu décrété unilatéralement par la France. « L'important dans tout cela, c'est qu'il y avait une stratégie. Il y avait des contacts d'abord et par la suite une série de négociations. Le GPRA s'était très bien préparé : nous avions décidé d'aller vers ces négociations en pensant toujours à imposer le principe du droit des Algériens à un scrutin d'autodétermination. Cela nous a aidés à reporter à des dates propices beaucoup de points qui se posaient lors des débats », a-t-il expliqué. « Les Français nous ont demandé par exemple de leur donner des garanties sur certains points, comme les questions culturelles, les Européens vivant en Algérie, et nous avons pu répondre : vous ne nous reconnaissez pas, nous sommes des hors-la-loi à vos yeux, comment pouvons-nous vous donner des garanties ? », ajoute Abdelhamid Mehri. Mehri a rappelé à l'assistance le fait que « le FLN a réussi à se poser en seul interlocuteur des Français ». « Il y avait parmi nous des gens qui n'étaient pas chauds pour les négociations et le référendum d'autodétermination. Ils avaient peur des résultats. Tout cela est normal. Ce qui ne l'est pas, c'est de vouloir occulter cette page », a dit le conférencier. Lui succédant, Mostefaï, l'un des membres de l'Exécutif provisoire installé à Boumerdès entre le cessez-le-feu et la proclamation de l'indépendance, a souligné que le but du FLN en lançant la lutte armée n'était pas de vaincre militairement les Français, mais c'était plutôt une victoire politique, diplomatique. « Chose qui a pu se réaliser avec les accords d'Evian », a-t-il ajouté. Mostefaï a rappelé à l'assistance que Abderrahmane Farès, qui était à la tête de l'Exécutif provisoire, avait tenté d'entreprendre des négociations avec l'OAS avant d'être rappelé à l'ordre par le FLN. « Sur le plan administratif, Farès a été à la hauteur de sa mission, mais sur le plan moral, il a manqué d'honnêteté en développant des ambitions de devenir le premier personnage de l'Etat algérien indépendant », a-t-il dit. Auparavant, il avait voulu « expliquer pourquoi les gens de l'état-major de l'époque étaient tous contre les négociations d'Evian ». Mais Mehri lui a recommandé de laisser ça à plus tard.