Les habitants des villages Tizi Maâli, Azouna, Beni Sellam, Ath Amer Ouzeggane et Tazaghart dans la commune d'Ighram (daïra d'Akbou), à l'instar de ceux de certaines autres localités de Kabylie, viennent de célébrer, chacun de son côté, une fête populaire traditionnelle à la mémoire de leurs saints aïeux respectifs. Tenues une fois dans l'année, de telles festivités sont en fait un cérémonial liturgique du culte musulman appelé communément tsebyita. Elles constituent une occasion propice pour implorer la baraka dans une ambiance d'allégresse. Les mausolées étant tous situés sur les hauteurs surplombant la vallée de la Soummam, c'est par des pistes cahoteuses et des sentiers escarpés que des centaines de visiteurs s'y rendent en famille. L'évènement nécessite d'intenses préparatifs et plusieurs équipes de bénévoles sont chargées de se partager les tâches consistant notamment à nettoyer les lieux, à faire la cuisine et sacrifier plusieurs têtes de bovins, d'ovins et de caprins. Tout le monde met la main à la pâte dans la bonne humeur. Le service communal d'hygiène est sollicité pour assurer le contrôle des viandes, des produits alimentaires et la javellisation de l'eau de boisson. L'intoxication alimentaire qui a touché près de 300 personnes en 2001 hante toujours l'esprit des organisateurs. Les règles édictées par la tradition et la croyance font que les pèlerins se recueillent devant la sépulture du saint aïeul, font don d'une obole, allument des bougies et prient Dieu d'exaucer leurs vœux. Ceux-ci concernent généralement leurs préoccupations du moment, à savoir la fécondité pour les stériles, la guérison pour les malades chroniques, le mariage pour les filles célibataires... Toute la nuit et dans des endroits différents, les femmes et les hommes fêtent séparément l'évènement avec bendir. Le lendemain, tous les présents sont conviés à un déjeuner à même le sol. Un couscous convivial bien garni en plein air. Ce rituel reçoit un engouement de la part des jeunes de la région qui sont généralement attirés par des manifestations plus « branchées ». L'étonnante ferveur dont ils font preuve est due sans doute au caractère festif de la tsebyita. Da Lahlou, un sexagénaire présent à tous les rendez-vous, estime que « chaque famille doit faire don de 4 litres d'huile ou de 600 DA. Il s'agit d'une tradition ancestrale que nos aïeux nous ont léguée et que nous perpétuons », ajoute-il simplement en guise d'explication.