Inconditionnels de Miss Marple, fans d'Hercule Poirot, oubliez l'Agatha Christie qui vous est familière, les maisons de maître, le brouillard et le tea-time pour les maisons de retraite, les paysages suisses et la pause whisky. Mercredi dernier, le Centre culturel français a proposé une séance cinéma très originale avec Mon petit doigt m'a dit… Le troisième film de Pascal Thomas avec la comédienne Catherine Frot, secondée d'André Dussolier, dans une adaptation — vous l'aurez compris — d'un roman d'Agatha Christie By the pricking of my thumb. Mais pourquoi les vieilles meurent-elles à la chaîne aux Coteaux ensoleillés ? Pourquoi Rose Evangelista a-t-elle subitement quitté la maison de retraite ? Prudence Beresford (Catherine Frot), une vraie fouine, enquête. Bon, dans le roman, Prudence et Bélisaire, son mari, sont en réalité des retraités anglais, ex-détectives privés. Pascale Thomas a fait de lui un militaire très sollicité et d'elle, une épouse désœuvrée à l'imagination fertile. Hormis cet écart, qui ne défrisera que les puristes, cette petite comédie est dans l'ensemble assez réussie. En particulier dans le casting. Si Catherine Frot ne nous surprend pas dans ce rôle de bourgeoise décalée, Valérie Kaprisky est bluffante, métamorphosée de sex-symbol en vieille fille aigrie et désespérée. A sa sortie, en avril 2005, la presse a salué « la fantaisie conjuguée au mystère » et « l'originalité du ton qui consiste à mêler la distance ironique avec l'inquiétude du récit gothique » (Positif), « Ce film pictural et poétique, fantaisie dramatique menée tambour battant. » (L'Humanité). On sourit devant la finesse des dialogues, on frissonne devant cette maison vide au fond de l'allée de platanes, et on se triture les méninges pour suivre l'intrigue où il est question d'enfants tués, de diamants, de jumeaux fusionnels, de cheminée et de lait empoisonné. Et plusieurs jours après, il vous trottera encore dans la tête une mélodie mystérieuse et entêtante : « By the pricking of my thumb, something wicked this way comes... »