L'éclairage public a été dernièrement le thème de journées d'étude organisées par la wilaya de Biskra auxquelles ont participé des représentants de bureaux d'études, des équipementiers et des sociétés qui activent dans le domaine, ainsi que des élus locaux qui ont pu se faire une idée du développement des techniques d'éclairage, du mobilier urbain disponible et des méthodes de gestion et de maintenance des systèmes d'éclairage. Le wali de Biskra a ouvert les travaux en déclarant : « Cette journée entre dans le cadre d'une série de rencontres techniques organisée à travers tout le pays, dont l'objectif premier est la finalisation d'un rapport d'expertise afin de déterminer les modalités d'intégration de schémas directeurs, prenant en charge la réalisation et la gestion de l'éclairage public dans chaque projet urbanistique comme c'est le cas pour l'assainissement et l'AEP. » La nécessité de prendre conscience du fait que l'éclairage est désormais « une science, un métier et un art à part entière » avec ses normes et ses techniques en perpétuelle évolution s'avère impératif afin de sortir de l'improvisation et des carences qui influent négativement sur le bien-être des citoyens, grèvent le budget des municipalités et freinent le développement économique, culturel et social des villes. Une bonne installation d'éclairage n'a plus vocation à seulement « éclairer les nuits propices à toutes les formes de criminalité » et ainsi assurer la sécurité des piétons, des automobilistes et des biens, elle a aussi le rôle de mettre en valeur les particularités et les richesses culturelle, archéologique, urbanistique et architecturale de la ville. Poteaux électriques, candélabres, luminaires et réverbères intégrés dans leur environnement doivent revêtir le cachet du lieu qu'ils illuminent. Tel est en condensé le contenu d'une première intervention. Une seconde intervention énumérera les quelques incohérences, défauts et lacunes flagrantes en matière d'éclairage public, constatés dans les cités et les agglomérations ; obscurité totale ou mauvais éclairage, irrespect des distances entre les lampadaires, inutile concentration de points lumineux ou inadéquation du style des équipements avec le lieu, mauvais calcul des coefficients de réflexion ou de l'énergie nécessaire, choix d'un matériel inadapté au climat et milliers de poteaux d'éclairage « éborgnés » ou dont les fils électriques sont à nu avec des bases souvent rouillées car mal scellées. Sid Ahmed Hebre, responsable du développement dans une grande société privée qui propose un éventail de solutions d'éclairage, avec du matériel algérien au style néo-mauresque, économique et anti-vandalisme, plaide pour que éclairagistes et paysagistes interviennent en amont des projets urbanistiques, il dira : « Le citoyen n'habite pas une maison, il réside dans une ville ou un village et un bon éclairage adapté et bien géré lui permet de se réapproprier les espaces de vie communs, tels que les places et jardins publics, les centres-villes et les quartiers périphériques. Les spécialistes en éclairage sont trop souvent appelés après la finalisation des travaux, et il est alors difficile de proposer des travaux et des solutions économiques et rationnelles ». Il ajoutera : « La mise en lumière est un volet qui représente 30% du budget des communes. La nuit, nos villes sont en majorité lugubres et dangereuses et c'est la responsabilité de tous : pouvoirs publics, entreprises de travaux d'éclairage et citoyens ». Une autre approche s'impose La mise en place de services techniques et la promotion d'entreprises locales de prestations de services permettront la rationalisation des besoins, la maîtrise de la qualité du matériel utilisé, le choix d'une lumière adéquate à un réseau routier, un ensemble urbain, un grand espace (stade, esplanade, jardin), ou à une œuvre architecturale, de faire le distinguo entre éclairage et illumination, d'améliorer le cadre de vie général des habitants, et, enfin, ce qui n'est pas négligeable, de créer des postes d'emploi dans ce créneau porteur, quand on sait que 70% de la population algérienne vivra en ville d'ici 20 ans, provoquant ainsi une augmentation des besoins en éclairage et en équipement urbain. Dr Mohamed Taïbi, chercheur en sociologie urbaine, consultant auprès de grandes entreprises et membre du Conseil de coopération interméditerranéen explique : « La lumière est un élément qui définit notre état psychologique et le type de relations que nous entretenons, non seulement avec nous-mêmes, mais aussi avec les autres et avec notre environnement et notre ville. Les équipements d'éclairage doivent être le fruit d'un agencement créatif entre la mémoire urbaine du terroir et les exigences imposées par la modernité urbaine. Les maires du futur devront gérer leurs villes comme des entreprises, et la reine des Ziban a tous les atouts en main pour être rentable sur tous les plans ». L'Etat alloue annuellement des budgets colossaux pour l'amélioration de l'éclairage public, mais la gestion et la maintenance des équipements et du matériel demeurent le talon d'Achille de nombreuses communes du pays. La réflexion entamée par les pouvoirs publics sur ce thème, augure-t-elle d'espaces publics mieux équipés, de routes plus sécurisées et de nuits mieux éclairées ?