Le plus grand défi pour le nouveau président mauritanien restera l'amélioration du niveau de vie de la population qui se dégrade de jour en jour en dépit d'une situation macro-économique favorable. Le nouveau président mauritanien, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, élu au second tour de l'élection présidentielle, tenu le 25 mars dernier, a pris ses fonctions le 19 avril dernier. Cela scellera définitivement une transition démocratique de 19 mois. Transition qui a été conduite par les instigateurs du coup d'Etat du 3 août 2003 contre l'ancien président, Mouaâwiyia Sid Ahmed Ould Taya. A leur tête, le colonel Ely Mohamed Ould Vall, président du Conseil militaire pour la justice et la démocratie (CMJD) et chef de l'Etat. Pendant la période de transition, le CMJD et le staff gouvernemental, à sa tête le Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubacar, ont mené des réformes qui ont réduit Le nouveau président doit faire face à de grands défis économiques et sociauxla mauritanie tente d'entamer une nouvelle èreLe plus grand défi pour le nouveau président mauritanien restera l'amélioration du niveau de vie de la population qui se dégrade de jour en jour en dépit d'une situation macro-économique favorable. un tant soi peu les injustices sociales, de l'avis même des Mauritaniens. Si les fidèles de " Mouaâyia" voient tout d'un œil critique, bon nombre de Mauritaniens reconnaît que la transition, menée par le CMJD, a donné un cadre global de gouvernance et des structures censées répondre aux besoins impérieux de la population qui est de l'ordre de 3 millions. Réformes Outre la réforme de la justice, le gouvernement a mis le holà à l'anarchie régnant dans le secteur de la pêche, considéré comme névralgique du fait qu'il représente près de 30 % des ressources du pays. Les accords de pêche avec son principal partenaire économique, à savoir l'Union européenne (UE), ont été renégociés de telle sorte à ce que le pays tire plus de profit. Le nouveau texte, signé en 2006 et applicable pendant six ans, stipule que l'UE et les sociétés de pêches de l'espace économique européen doivent verser chaque année 116 millions d'euros à l'Etat mauritanien, alors qu'elles ne versaient auparavant que 96 millions. La révision de ces accords a également permis de réduire les quantités de pêches autorisées sur certaines espèces menacées et aussi de mettre un terme à la pêche excessive et sauvage exercée par certaines sociétés étrangères. Ces mesures ont été favorablement accueillies par la population. Mais ce n'est pas tout. Les salaires des fonctionnaires ont été doublés à deux reprises, en décembre 2005 et en janvier 2007. Mesure qui a touché près de 400 000 personnes. Au plan financier, la situation a été assainie : la dette extérieure est passée de 2,2 milliards à 1,1 milliards de dollars. Le produit intérieur brut (PIB), qui était de 5,4% en 2005, s'est élevé jusqu'à 14% en 2006. L'inflation, quant à elle, s'est stabilisée à hauteur de 10% en 2006. Selon les prévisions , elle sera ramenée à 5 % en 2007. Le déficit public, quant à lui, a été divisé par deux. De 8% en 2005, il a été ramené à 4% en 2006. Cela dit, la croissance économique a été boostée par l'exportation du pétrole, depuis l'entrée en exploitation du gisement en off-shore en début de l'année écoulée. Mais aussi par l'augmentation des cours mondiaux du fer et de l'or. S'y ajoute l'allègement des charges dû à l'effacement de la dette du pays (819 millions de dollars) par le FMI, la Banque africaine et la Banque mondiale en juin 2006. Les connaisseurs de la Mauritanie estiment que beaucoup reste à faire pour arriver à sortir ce pays désertique de l'ornière. S'il y a eu amélioration au plan macro économique reflétée par le renflouement des caisses de l'Etat, il reste qu'un quart de la population vit encore sous le seuil de la pauvreté. Selon le rapport 2006 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), plus de 25% de la population vivent avec moins de 1 dollar par jour et près de la moitié souffre de la rareté de l'eau potable. L'analphabétisme touche également près de 50% de la population. Cette situation de dénuement d'une bonne partie de la population est essentiellement due à l'iniquité dans la répartition des richesses. Dans la société mauritanienne, on trouve des riches qui dépensent sans compter et des pauvres qui ne mangent pas à leur faim. Ainsi, le nouveau président aura à relever le défi pour réduire les écarts entre riches et pauvres et assurer une certaine équité dans la redistribution des ressources du pays et garantir une relative justice sociale. Si la conjoncture actuelle plaide en sa faveur, le nouveau chef de l'Etat aura une tâche des plus ardues surtout que les attentes sont énormes. C'est tout un pays à construire. Un pays qui faisait partie, il n'y a pas longtemps, des 14 les plus pauvres de l'Afrique. Pétrole La découverte du pétrole, dont le premier gisement off-shore est entré en exploitation le 26 février 2006, peut changer la donne et aider la Mauritanie à se relever de son marasme social. Les experts en la matière prévoyaient une production de 75 000 barils par jour. Mais voilà que les prévisions s'avèrent inexactes. La firme australienne qui exploite ce gisement situé à Chinguetti, au large de Nouakchott, n'a pu produire en 2006 que 37 000 barils par jour. Le volume est donc faible. Mais pour un pays de 3 millions habitants, cela s'annonce prometteur. D'autant plus que l'espoir de découvrir d'autres gisements est maintenu. Mais, loin de l'euphorie des uns, il y a la crainte des autres. En effet, les Mauritaniens dans leur grande majorité redoutent que cette manne pétrolière soit une malédiction qui mettra le pays dans la léthargie et qui aggravera les écarts sociaux et attisera le phénomène de la corruption. Les pessimistes relèvent que l'exploitation du pétrole depuis un an n'a pas changé la donne. Pour ceux-ci, les effets directs de l'or noir se limitent le plus souvent à d'imposantes villas au cœur de Nouakchott et à de rutilantes voitures. Il n'y a, à leurs yeux, que quelques uns, des plus chanceux, qui ont été recrutés dans les nouvelles entreprises attirées par la découverte de cette autre ressource naturelle. Quant aux optimistes, ils estiment qu'avec la mise en place de mécanismes de contrôle efficaces, la manne pétrolière profitera à tout le monde et aidera le pays à se développer. Afin de développer l'activité pétrolière, le CMJD a créé la société mauritanienne des hydrocarbures (SMH) quelques mois seulement après le coup d'Etat, soit le 7 novembre 2005. La mission de cette société est de maximiser la valeur tirée de cette ressource, tout en gardant le maximum d'attractivité pour les investisseurs. La SMH est présente à hauteur de 12% dans le champ de Chinguetti et envisage d'augmenter son taux de participation à l'avenir. En 2006, la production globale de ce champ s'est élevée à plus de 11 millions barils. Investissements Les ventes ont permis à la SMH d'engranger 153 millions de dollars dont 88 millions ont été directement versé dans le Fond national des Ressources en Hydrocarbures. Ce fond a été créé en vue de permettre une propagation équitable de la prospérité attendue de cette nouvelle ressource et activité. D'autres champs, à savoir celui de Ouata et de Tevet, devraient entrer en exploitation d'ici à 2010. De l'avis des experts, si cette ressource est bien gérée, elle stimulera le décollage de l'économie mauritanienne et engendrera le développement. Dans le cas contraire, elle serait la prochaine source d'instabilité du pays et exacerberait les appétits de pouvoir des uns et des autres. Au sujet des investissements, les décideurs ont plutôt rassuré les partenaires économiques de la Mauritanie. Au lendemain de sa prise de pouvoir, le CMJD a annoncé son plan de sauvetage économique en allégeant la procédure pour les investisseurs qu'ils soient nationaux ou étrangers. Cela a donné son fruit. En effet, quelques mois plus tard, une nouvelle compagnie aérienne privée voit le jour. Il s'agit de Mauritania Airways, qui est née d'une alliance entre Tunisair (Tunisie), un important groupe privé mauritanien et l'Etat. Des banques étrangères, telles que Société générale et Paribas, s'y sont vite installées essentiellement pour accompagner les sociétés françaises qui exercent dans ce pays. Si les investisseurs étrangers viennent, c'est parce qu'ils ont vu que l'Etat a mis les standards internationaux dans sa gestion des affaires économiques. Ainsi, le CMJD a mis en place les bases d'un fonctionnement meilleur de l'économie, le président Cheikh Abdallahi aura à construire l'édifice.