La morgue est un endroit qui suscite peur et appréhension. Tous les centres hospitaliers disposent de morgue mais les plus en vue sont celles d'El Alia et de Bologhine qu'entretient l'Entreprise de gestion des pompes funèbres et cimetières (Egpfc). « La morgue d' El Alia est d'une capacité de 108 cases alors que celle qui se trouve au cimetière chrétien de Bologhine ne dispose que de 34. A l'arrêt durant 1995 et 1996, cette morgue, ouverte en 1832, a été reprise et réaménagée. Mais comme nous n'avons pas tellement de cadavres, la morgue d'El Alia nous suffit », assure M. Djakhnoun, directeur de l'Egpfc. Chapeautés par un chef d'équipe, deux groupes de huit agents se relaient afin d'entretenir les neuf chambres contenant neuf cases de la morgue d'El Alia. Ces agents « reçoivent » les corps, transportés par quatre ambulances, les enregistrent et leur donnent un numéro avant qu'ils ne soient « casés » dans l'une des chambres. « En plus des tenues de rigueur, nos agents sont vaccinés et passent des visites périodiques à l'hôpital Debaghine (ex-Maillot). Une convention a été signée avec le service de médecine du travail de cet hôpital », assure le directeur. La température dans ces endroits reste constante. Elle est toujours de zéro degré « pour que le corps ne gèle pas ou ne se décompose pas ». Une convention a été ainsi, signée avec un spécialiste en climatisation qui vient chaque semaine entretenir les machines. Cette morgue a été beaucoup sollicitée durant les deux catastrophes qu'a connues la capitale. Elle a ainsi reçu lors des inondations de Bab el Oued pas moins de 500 corps. Lors du séisme du 21 mai 2003, 800 corps y ont été également transférés. Des tentes furent aménagées dans l'enceinte de la morgue afin de recevoir les corps placés dans des cercueils. Il reste que l'opération n'a pas trop duré, soutient M. Djakhnoun. « En l'espace d'une semaine presque tous les corps ont été identifiés et le lendemain même, nos agents ont enterré plus de 172 corps », relève-t-il en précisant que pratiquement 80% des corps « réceptionnés » ont été inhumés au niveau du carré 256, appelé depuis, « le carré séisme ». Une morgue d'une grande capacité reste « très nécessaire » vu que l'Algérie n'est nullement à l'abri de pareilles catastrophes, atteste M. Djakhnoun. « En raison de ces deux malheureuses expériences, nous avons réfléchi à la création d'une morgue plus importante ; l'étude est en cours. Elle a été confiée temporairement au BEHA », indique le directeur qui reconnaît la difficulté de mener à bien cette opération jamais entreprise. Localisée au niveau d'El Alia, elle aura une capacité de 400 cases. Pourquoi un tel choix ? « L'endroit est bien situé, soit entre les deux autoroutes, la RN 5 et l'autoroute de l'Ouest. Les interventions peuvent se faire beaucoup mieux. Le lieu est assez vaste et peut contenir plusieurs personnes », relève M. Djakhnoun. Les morgues des hôpitaux, souvent petites, sont faites pour des autopsies et des identifications. Celle du CHU Mustapha ne peut contenir plus de douze corps. « Quand il y a un retard dans l'identification et afin de permettre aux hôpitaux de fonctionner correctement, les corps sont transférés à El Alia », relève le directeur en assurant que celle-ci « tourne » quotidiennement avec vingt corps. Des conventions avec tous les hôpitaux d'Alger ont été signées permettant le transfert des organes humains. Les pompiers, qui trouvent sur la voie publique des corps sans vie, les transfèrent à la morgue. Les particuliers peuvent aussi le faire pour leur proches, gratuitement. Aucune loi n'est venue combler le vide concernant la durée de conservation des corps à la morgue. « Seul l'autorité judiciaire compétente peut nous autorise à enterrer ces corps », assure M. Djakhnoun.