A Grenoble, Ali Djilali-Bouzina a redonné au cours des derniers jours d'avril, entre les deux tours de la présidentielle, 75% Familles nombreuses. Le comédien n'en oublie pas ses racines. Il travaille sur des échanges culturels entre Constantine et Grenoble où il est installé. Un groupe de jeunes Constantinois va venir en juin pour participer à des ateliers (théâtre) avec la complicité de la Maison pour tous de Mistral à Grenoble du 11 au 18 juin 2007. Sa dernière pièce emprunte à l'itinéraire personnel du comédien, auteur et metteur en scène, né en 1956 à Alger et arrivé à l'âge de 4 ans à Strasbourg où il a appris l'alsacien. Alors que l'identité nationale est devenue le viatique de la politique française, 75% Familles nombreuses est un one man show dont l'action se déroule en Alsace, lieu symbole en France, car cette région a changé à plusieurs reprises d'identité suivant le cours de l'histoire. Comment avez-vous ressenti le débat de la présidentielle sur l'idée d'identité nationale, alors que votre one man show pose justement la question de l'identité difficile de l'exilé ? Le débat sur l'identité nationale m'agace. Le rapprochement entre immigration et identité nationale me semble étrange, les immigrés menaceraient-ils l'identité nationale ? L'intégration s'est toujours bien faite en France, je parle le français, l'arabe dialectal et l'alsacien, et comme je le dis dans mon spectacle, plus loin je ne peux plus aller, sinon je vais me désintégrer. Blague à part, il y a plutôt un problème de pauvreté qui existe en France et de ghettos. Les médias mettent l'accent sur la frange de la population immigrée qui ne va pas bien, pas sur celle qui réussit. Aujourd'hui, les comédiens issus de l'immigration ne sont plus rares comme autrefois. Ceux de votre génération ont eu un parcours difficile. Comment êtes-vous arrivé à ce métier ? J'ai commencé à faire du théâtre au lycée, une prof de gymnastique s'occupait d'ateliers amateurs. Ensuite à Strasbourg, j'ai rencontré une troupe semi professionnelle. Mon arrivée à Grenoble dans les années 1980 m'a permis d'entrer dans le métier d'une façon plus professionnelle. En 1988 je crée avec mon collègue Abdou Elaïdi, la cie Nomade's land et notre premier spectacle Les champs de couscous ne donnent plus de blé, qui sera joué plus de 500 fois, puis Et que valsent les cigognes et enfin deux créations au Maroc Eh psst habibi sur les rapports hommes femmes, et Zanqat 14 à Casablanca. L'Algérie, aujourd'hui, c'est quoi pour vous, qu'est-ce que ça représente ? L'Algérie est un pays qui représente mes racines, c'est la terre de mes parents et c'est un pays que j'ai redécouvert ces dernières années. Je voudrais créer un pont artistique entre ces deux rives. Le peuple algérien me touche, me fait rire et m'émeut. L'échange entre Constantine et Grenoble constitue la concrétisation de tout cela. Votre spectacle est aujourd'hui disponible en vidéo, quel est l'accueil du public ? Le public se retrouve dans mon spectacle. Il permet aux spectateurs de comprendre que l'immigration n'est pas un long fleuve tranquille.