Mis sous mandat de dépôt par le procureur du tribunal militaire de Blida, vers la fin du mois de février dernier, Moumene Ould Kaddour, patron de la compagnie américano-algérienne BRC, est poursuivi, avec deux autres personnes, dont un militaire, pour atteinte à la sûreté de l'Etat, apprend-on de source judiciaire. Cette affaire, tenue secrète, concerne une histoire d'écoute téléphonique, dans laquelle serait impliqué le patron de la société Brown Roots Condor (BRC), un officier du service des écoutes au ministère de la Défense nationale ainsi qu'un civil. L'affaire a éclaté alors que le gros dossier des marchés « complaisants de gré à gré » donnés à BRC, une joint-venture entre Sonatrach (51%) et BRC, une filiale de la compagnie Halliburton, est actuellement en instruction auprès du tribunal de Bir Mourad Raïs, près la cour d'Alger. Selon nos interlocuteurs, le magistrat instructeur a déjà entendu de nombreux hauts responsables, dont Moumene Ould Kaddour, et une dizaine d'entre eux ont été mis sous contrôle judiciaire pour surfacturation de contrats et des marchés de gré à gré sans appel d'offres, comme le stipule la loi, notamment pour la réalisation des deux tours abritant aujourd'hui les sièges du ministère de l'Energie et qui auraient coûté 40 milliards de centimes chacune au contribuable. C'est à la suite d'une mission d'inspection de l'IGF, dépêchée sur instruction du président de la République, que les enquêteurs ont relevé, en passant au peigne fin les contrats avec BRC, que celle-ci a bénéficié de privilèges et de complaisance pour accaparer de nombreux contrats avec Sonatrach, le ministère de l'Energie et des Mines, celui de la Défense nationale et Naftec. Une plainte a été alors déposée vers la fin de l'année 2006, auprès du parquet de Bir Mourad Raïs, lequel instruit l'affaire depuis plusieurs mois et semble revoir tous les marchés accordés à cette société depuis 2001. Ce qui a laissé croire que la liquidation de cette société n'a pas pour autant fermé le dossier. Des révélations intéressantes sont à attendre lors de ce procès qui s'annonce déjà houleux. Ce scandale a fini par causer la faillite de la société, créée en 1994, dissoute au début de cette année, et un liquidateur a été désigné pour gérer ses actifs et ses passifs. Les représentants de la multinationale américaine, membres du conseil d'administration, ne se sont pas opposés à la décision finale et l'ont à ce titre entérinée.