Lors de sa conférence de presse sur son programme de politique, le 28 février, le candidat à la présidentielle Nicolas Sarkozy a affirmé que le projet d'une Union de la Méditerranée, qu'il ambitionne de conduire s'il est élu, est à la fois « une méthode » pour atteindre les objectifs de politique étrangère qu'il assigne à sa présidence, en même temps que c'est « un objectif ». Une méthode comme l'a été la construction européenne après la Seconde Guerre mondiale. « Le rêve européen a besoin du rêve méditerranéen », a-t-il affirmé. Faisant le constat du processus de Barcelone, il a proposé de « prendre le problème autrement ». « C'est d'abord aux pays méditerranéens eux-mêmes de prendre en main la destinée que la géographie et l'histoire leur ont préparée. C'est à la France européenne et méditerranéenne à la fois, de prendre l'initiative avec ses partenaires du sud de l'Europe, d'une Union méditerranéenne comme elle prit jadis l'initiative de construire l'Union européenne. » Dans cette Union de la Méditerranée, la Turquie — dont il s'oppose à l'entrée dans l'UE, parce que, selon lui, non européenne — « trouverait tout naturellement sa place ». « La Turquie est un grand pays méditerranéen avec lequel l'Europe méditerranéenne peut faire avancer l'unité de la Méditerranée », avait-il déclaré à Toulon. « C'est dans la perspective de cette Union méditerranéenne qu'il nous faut repenser ce qu'on appelait jadis la politique arabe de la France », indiquait-il encore à Toulon. Cette Union méditerranéenne devra prendre en charge, selon Nicolas Sarkozy, « les questions de lutte contre le terrorisme, la gestion concertée des migrations, le développement économique et commercial et la promotion de l'Etat de droit dans la région ». Elle aura vocation à « travailler étroitement avec l'Union européenne, et un jour à avoir avec elle des institutions communes ». Il a souhaité que « la France se voit de nouveau comme une puissance méditerranéenne majeure », que « la Méditerranée devienne le pivot d'une grande alliance entre l'Europe et l'Afrique qui puisse devenir dans la mondialisation le contrepoids de l'Amérique et de l'Asie ? » Quel rôle ? Quel statut ? Quelle place réserve Nicolas Sarkozy dans ce projet aux pays de la rive sud de la Méditerranée ? Le rêve de cette Union de la Méditerranée serait-il celui qu'il évoquait, nostalgique d'un passé colonial révolu, à Montpellier : « Le rêve européen a besoin du rêve méditerranéen. Il s'est rétréci quand s'est brisé le rêve qui jeta jadis les chevaliers de toute l'Europe sur les routes de l'Orient, le rêve qui attira vers le Sud tant d'empereurs du Saint Empire et tant de rois de France, le rêve qui fut le rêve de Bonaparte en Egypte, de Napoléon III en Algérie, de Lyautey au Maroc ? » Autrement dit, le rêve d'une Europe conquérante, dominatrice.