Des maisons risquent à tout moment de s'effondrer dans les vieux quartiers de la ville de Béjaïa. L'une d'elles, sise à Bab El Louz, à l'orée de Sidi El Khider, est dans un état inquiétant. Le propriétaire, Ahmed Benkhelifa, nous a convié à mesurer de visu le sinistre. Gondolé, le mur d'enceinte annonce la couleur. Le balcon intérieur est décharné par pans entiers, laissant apparaître l'armature. Pour éviter que les plaques de béton érodé qui s'en détachent ne fassent des victimes, on a installé une obturation de fortune : des tôles de plastique soutenues par des chevrons. Les plafonds, lorsqu'ils ne présentent pas de fissures et la couche inférieure désagrégée par endroits, sont, tout simplement, devenus perméables à l'humidité. Mme Benkhelifa vit la peur au ventre « que le toit ne lui tombe sur la tête ». Bien maigre prévention, « c'est sous un parapluie » que sa famille fait usage des toilettes. Dans la chambre qu'occupe Nadir, 28 ans, il se dégage une forte odeur de moisi. Pas de fenêtre. Et le plafond a été « consolidé » de tôles de métal parées d'une pièce de contreplaqué. C'est bien simple, Nadir paye le sinistre avec « cinq allergies développées ». Les murs de la cuisine sont lézardés et, nous dit Ahmed, du fait que cette pièce est attenante à « un puits » se trouvant à un niveau plus élevé dans la maison voisine, « il est soumis » à un replâtrage permanent du crépissage. Et en hiver, avec la montée des eaux, « il dégouline de partout ». Dans cette maison de 5 pièces où le soleil est absent une grande partie de la journée, en témoignent ces lampes allumées en plein jour, ce sont « 18 personnes, pour la majorité adultes », à vivre une situation alarmante. La commission technique de l'APC a, dès 1997, établi la gravité du degré de vétusté et la commission d'évaluation des dégâts causés par le séisme de mai 2003 a dressé un procès-verbal faisant le constat de l'aggravation du sinistre. La commission a conclu à l'impérative mise sous scellés de l'habitation. Mais les Benkhelifa sont toujours là.