Deux thèmes qui n'ont aucun lien entre eux ont capté l'actualité cette semaine, l'un très visible et même explosif— sur le petit écran national, l'autre pas. Le premier concerne la sortie catastrophique de la sélection algérienne de football face à une équipe guinéenne qui n'avait rien d'un foudre de guerre sinon une impéccable discipline dans le jeu comme atout principal. Le second a trait à la censure (faut-il la qualifier autrement ?) qui a frappé la dernière production cinématographique de J.P Lledo alors que le film en question était programmé en avant première mondiale à la salle Ibn Zeidoun dans le cadre de l'année culturelle arabe abritée par notre pays. Football et cinéma ont donc nourri les mêmes sentiments de colère et de désillusion. La défaite des Verts à laquelle personne ne s'attendait a été ressentie par nos supporters comme une immense humiliation au moment ou à travers le pays on s'apprêtait à vivre une longue nuit de liesse populaire pour fêter la qualification assurée à 90% de nos représentants à la prochaine coupe d'Afrique des nations. Décidément, y a rien qui procure de la joie dans ce pays (oualou maï ferrah) entendait-on dire parmi la foule de fans désabusés, qui s'étaient sentis comme trahis par une sélection totalement méconnaissable et qui donc n'a jamais pu, dans cette épreuve, être à la hauteur de ses responsabilités historiques. Cet échec nous rappelle, par certaines facettes, celui à trois dimension consommé contre la Maroc en demi-finale de la même compétition africaine organisée en 2004 par la Tunisie. Les Verts, selon les spécialistes, se font toujours piéger par une grosse défaillance de coaching. Au 5 Juillet, par une belle soirée d'été, ça a été le cas car jouer la prudence à outrance devant un adversaire venu tenter son va-tout à l'extérieur de ses bases n'était sûrement pas la meilleure des tactiques à adopter. Le choc a, en tout cas, été terrible. Comment donc a-t-on pu rater lamentablement un rendez-vous aussi décisif alors que toutes les conditions paraissaient réunies pour ponctuer ce cycle éliminatoire par un baroud d'honneur qui nous aurait fait frémir de plaisir et de fierté. Un stade plein comme un œuf, un temps idéal, un public enthousiaste et solidaire,une ambiance surchauffée,une équipe d'apparence conquérante toute auréolée d'une prestation honorable face à la grandissime équipe d'Argentine en match amical, une sélection de Guinée très prenable et par-dessus ce décor euphorisant, un conditionnement médiatique,de la part de la télé notamment, qui ne pouvait laisser planer aucun doute dans les esprits. On n'était plus dans une rencontre de feu, mais dans une simple formalité agrémentée par des attitudes ultra nationalistes comme celle par exemple de l'envoyé spécial de Canal Algérie qui n'a pas trouvé mieux, pour afficher sa passion débordante, que de se draper de l'emblème national pour faire ses envois à partir du stade. Une image à la limite du folklore qui cependant a disparu du petit écran quand l'imprévisible tomba comme un couperet. Au demeurant, à l'annonce du résultat final, l'atmosphère changea du tout au tout.Les caméras de l'Unique plièrent bagages. Y avait plus rien à voir, ni à commenter. Chape de plomb sur la déconfiture... Silence pesant aussi sur un film qui apparemment dérange, ou plutôt n'entre pas dans le moule officiel de l'année culturelle arabe puisqu'il a été retiré de l'affiche alors qu'il allait être projeté en exclusivité par son réalisateur devant un public convié par invitation dans lequel se retrouvaient cinéphiles avisés et diplomates. A Constantine et Oran,les portes lui ont été également fermées. Motif : une copie de cette production n'a pas été remis au ministère de la culture pour visionnage préalable, ce que l'auteur conteste affirmant que cette obligation ne figurait pas dans le contrat. Mais la polémique ne s'arrête pas là puisque Madame la ministre qui a géré personnellement ce dossier, affirme sur les ondes de la chaîne Une que le documentaire de JP Lledo ne devait pas dépasser les 52 minutes, ce que là aussi le cinéaste considère comme une contre-vérité car dit-il “j'ai en ma possession la lettre de Madame Toumi donnant son accord, en 2005, pour la réalisation d'un long métrage”. Lledo qui a toujours fait montre d'une activité cinématographique engagée en Algérie rejette les faux expédients exprimés pour cautionner l'interdiction qui frappe son film. Il pense qu'il s'agit d'une censure qui ne dit pas son nom et qui a trouvé dans l'histoire de la copie un beau prétexte. D'autant que l'ONDA trouve que rien dans le contrat ne va dans le sens du desiderata ministériel. Il compte d'ailleurs donner toutes les informations qui plaident en sa faveur dans une conférence de presse qui sera organisée incessamment. Tout en pensant que ces mesures d'interdiction sont en contradiction avec les principes de la liberté d'expression que l'Algérie compte précisément affirmer en accueillant la culture arabe dans toute sa diversité. Au fait on se demande pourquoi cette levée de bouclier contre un film documentaire que personne n'a encore vu en dehors de son auteur bien sûr, et qui visiblement a posé un gros problème à Khalida Toumi. Est-ce la forme ou plutôt le fond qui qui sont sujet à controverse ? Assurément, il y a ,à travers cette censure, une autre désillusion culturelle que la partie officielle refuse d'assumer.