L'ouverture de l'audiovisuel algérien à l'initiative privée n'est pas à l'ordre du jour. Ce n'est tout au moins pas une option retenue par le gouvernement qui entend maintenir le monopole étatique sur ce secteur tout en envisageant la reconfiguration de l'audiovisuel dans le cadre d'une transition qui favoriserait l'émergence de nouvelles chaînes du réseau public. Le positionnement officiel, tel qu'il transparaît dans le programme du gouvernement, ne prend donc pas en compte un certain nombre d'hypothèses dont celles liées à la constitution de télévisions à capitaux mixtes, voire d'entités privées régies par un cahier des charges comportant des dispositions très strictes. Une telle vision figurait d'ailleurs dans le programme du RND, l'un des partis de l'Alliance présidentielle, et avait pu être perçue comme une évolution significative par nombre d'observateurs qui en avaient déduit à un possible déverrouillage. En fait, tout indique que l'ouverture du champ audiovisuel se heurte encore frontalement à des présupposés qui considèrent cette option comme prématurée, et sans doute même comme un saut dans l'inconnu. La télévision et la radio, médias lourds par excellence, ont toujours constitué en Algérie des vecteurs du discours officiel et les lieux privilégiés où s'exprime la communication gouvernementale. C'est une règle qui pourrait être tenue pour universelle sans que pour autant le droit à l'expression ne soit pas accessible aussi à d'autres sensibilités dans le respect des lois du genre. La question qui peut faire débat, alors, est celle de savoir si la multiplication de canaux publics n'aura pas que la seule finalité de décupler les capacités d'impact du discours officiel au détriment d'une activité économique induite qui renouvellerait les opportunités de travail pour les Algériens. Les tenants de l'ouverture, en récusant la seule dimension idéologique du phénomène, plaident pour un élargissement du champ audiovisuel aux domaines de l'emploi, aux ressources liées à la conduite des grands chantiers immobiliers et industriels lancés dans le pays, aux autres entreprises de modernisation de la société que les chaînes publiques ne peuvent pas accompagner seules. La mise en concurrence, du point de vue de la capitalisation engendrée par le pays au travail, s'inscrirait dans une logique d'économie de marché dont il est incompréhensible qu'au stade actuel le champ audiovisuel en soit le seul dispensé. En amont et en aval du champ audiovisuel il y a d'indiscutables indices de développement économique tant l'activité est fournisseuse d'emplois et de plus-value en termes de professionnalisation de tous les corps de métiers attachés à l'animation de chaînes de télévision et de radio. C'est un enjeu qu'assument déjà bien des pays qui ont joué la carte de l'ouverture comme un gage donné à l'insertion dans les difficiles joutes de la mondialisation dans laquelle il n'est pas évident de conquérir des parts de marché. La bataille de l'audiovisuel, engagée dans les années 1990 avec l'émergence de la parabole et des satellites, incite à la combativité créatrice parce que les gros diffuseurs ne s'embarrassent plus de territorialité ou de frontières. C'est une bataille à laquelle ne peuvent échapper, au-delà de toute contingence étroitement idéologique, les professionnels et les managers de l'audiovisuel algérien qu'ils appartiennent à la sphère publique ou privée. La place qu'ils ont à prendre dans l'échiquier international, personne ne leur en fera cadeau, à plus forte raison encore s'ils n'ambitionnent qu'une résonance locale.