Le métro d'Alger n'a pas encore été livré que de grandes entreprises internationales se disputent le contrat de l'extension. Alors que le ministère des Transports tarde à annoncer l'entreprise- gagnante de l'appel d'offres lancé il y a plus de six mois, les rumeurs vont bon train. Gaama, groupement algéro-allemand qui a réalisé la première partie du métro, s'inquiète de perdre un créneau dans lequel il emploie quelque 2000 personnes… La bataille pour le marché de l'extension du métro d'Alger est lancée. Quatre entreprises sont sur les starting-blocks. Le groupement algéro-allemand Gaama est donné favori dans la mesure où il a déjà une expérience dans la construction du métro d'Alger et qu'il a achevé la première phase dans des délais acceptables. Mais dans le milieu des affaires comme dans les courses de sprint, le favori n'est pas forcément gagnant. Six mois ont passé après l'ouverture des plis de l'appel d'offres et le ministère des transports n'a pas encore tranché. Le bras de fer oppose le groupement algéro-allemand (composé de la société allemande Dywidag International et la société algérienne Cosider en partenariat avec un sous-traitant italien Trevi) aux françaises Vinci construction et la société Razel et à l'entreprise portugaise Zagope. L'ouverture des plis de l'offre financière permet d'observer que la meilleure proposition appartient à Gaama (215 millions d'euros), Razel (France) avec une offre de 224 millions d'euros, un groupement portugais (233 millions) et la société Vinci (244 millions d'euros). " Nous sommes les moins disants ce qui nous laisse espérer d'avoir le marché ", dira le président du conseil d'administration de Gamma, Daniel Fauquembergue. Peu d'éléments ont filtré sur la meilleure offre technique. Les responsables de Gaama savent que des expertises sur ce sujet ont été établies par l'Entreprise du métro d'Alger (EMA). " Ces expertises convergent vers nous ", croient savoir les responsables de Gaama. Mais déjà, les rumeurs vont bon train. L'on raconte, en effet, que les Français seraient bien placés pour décrocher le marché, laissant présager un nouvel affrontement franco-allemand au sujet du métro d'Alger. Les responsables de Gaama font mine de ne pas s'en soucier. " Il est vrai que nous avons été surpris par ce qui se dit, il semble que certaines entreprises font du lobbying. Mais depuis que je vis en Algérie, j'ai appris à ne pas écouter ce qui se raconte, on ne sait jamais ce qui peut se passer ", lance M. Fauquembergue. Ce qui l'inquiète, lui, c'est surtout le silence du ministère des Transports. " Nous avons été assez gâtés lors de l'appel d'offres de la première phase. Nous avons su que nous étions désignés au bout de deux mois ", se rappelle M. Fauquembergue. Contacté, le ministère des Transports s'est montré peu prolixe sur le sujet. Gaama est confronté à des adversaires coriaces ayant déjà réalisé d'importantes performances en Europe et en Asie. Le groupement algéro-allemand a peut-être l'avantage d'avoir réalisé la première partie du métro d'Alger. Ses responsables insistent sur le fait d'avoir formé près de 2000 employés algériens auprès de spécialistes allemands. " Si nous n'arrivons pas à décrocher ce marché, l'on aura signé notre arrêt de mort ", soupire M. Issaad Mahieddine, directeur adjoint des travaux à Gaama. A voir le bureau de M. Fauquembergue, l'on sent à quel point l'obtention du marché leur tient à cœur. Les murs sont tapissés des plans de l'extension du métro d'Alger. Dans l'une des armoires, l'on compte une quinzaine de dossiers consacrés à ce marché. Le projet consiste en une extension de 2,8 km, comportant la réalisation de quatre stations (Bachdjarah 1, Bachdjarah 2, El-Harrach-Centre et El-Harrach-Gare, avec une connexion métro-rail. Cette extension comporte aussi la réalisation d'un viaduc au niveau de Oued-Ouchayeh, ainsi qu'un passage au-dessous de l'oued El-Harrach. Le plan prévoit également une station multimodale comportant un point de croisement entre les gares de train, métro, bus et taxis. L'attente se fait longue. Les représentants du groupement tentent d'en profiter pour faire sa promotion. Connu pour sa discrétion, Gaama se met à donner des conférences de presse pour annoncer " l'achèvement des travaux " - du moins en génie civil - du métro d'Alger. Cela ressemble à la " méthode Idjerouidène ", le patron de Gofast (qui détient, entre autres, la compagnie Aigle Azur). Celui-ci a, en effet, organisé de nombreuses interventions médiatiques dans lesquelles il a présenté la bonne santé de son entreprise afin d'entrer dans le capital de la Cnan. Les responsables du groupement Gaama ont ainsi vanté le travail fait pour achever les travaux du métro d'Alger, rappelant que la première ligne au prix de 14,4 milliards de dinars (hors taxes) a été réalisée en 28 mois de manière anticipée dans certaines stations. " Nous avons beaucoup souffert dans la réalisation des travaux de génie civil de la première phase. Nous avons acquis une expérience formidable dans un terrain très difficile. Nous avons aujourd'hui une connaissance parfaite de la géologie algérienne. Nous avons déjà montré ce que nous pouvons faire, les Français ont tout à prouver ", plaide M. Fauquembergue. " Actuellement, beaucoup de nos employés partent en congé. On me demande ce qu'ils vont faire à leur retour et j'avoue que je ne sais pas quoi leur dire ", confie M. Issaad. Les représentants de Dywidag et de Cosider affirment qu'ils étaient prêts à commencer les travaux de l'extension cinq mois auparavant. Reste à savoir quelle sera la décision du ministère des Transports.