Si nous prenons l'expérience française, nous répondrons par l'affirmatif. En effet, c'est en 1945 où le projet de loi portant introduction du statut de fermage a été proposé pour une approbation. Un projet de loi qui n'a pas été perçu positivement par les propriétaires fonciers qui voyaient leurs intérêts menacés. Ce projet a été reconduit en 1946 et finalement il a été adopté. Nous connaissons la suite : la gestion du foncier agricole a pris le virage en faveur de l'effort et la sécurisation foncière. Cette nouvelle politique s'est construite sur des éléments clés. Nous pouvons citer : Le statut de fermage qui réglemente le bail agricole auquel revient le rôle de fournir les garanties aux exploitants (baux à long terme et stabilité du loyer). La décision administrative de réaffectation des exploitations abandonnées qui donne droit à un exploitant d'accéder à une propriété privée abandonnée. L'impôt sur la détention foncière qui oblige le propriétaire foncier à louer ou à vendre sa propriété, et permettre ainsi une nouvelle affectation foncière qui bénéficie à un exploitant d'accéder à la terre. La préemption privée qui permet à l'exploitant en place de bénéficier en priorité de l'acquisition de la propriété dans les mêmes conditions d'échange qu'un autre prétendant. L'intervention de l'Etat par des mesures juridiques permet la stabilisation de l'exploitant en place. L'attribution préférentielle qui permet à l'un des indivisaires de garder l'exploitation à condition qu'il ait participé à la mise en valeur. L'intervention de l'Etat par des mesures juridiques permet la stabilisation de l'exploitant en place. La préemption publique qui donne la possibilité et le droit à l'Etat de constituer une réserve foncière et ainsi permettre aux jeunes exploitants de s'y installer. L'intervention de l'Etat par des mesures juridiques permet une nouvelle affectation foncière. La politique de crédits qui a pour but d'avantager l'exploitation au détriment de la propriété foncière. Mesures sociales : l'Etat intervient pour substituer les exploitants âgés, et donc redistribuer les droits à l'exploitation de la terre. Groupement Foncier Agricole qui donne une alternative aux indivisaires de garder la propriété et permettre à un exploitant d'accéder à la terre. Ainsi, la sécurisation foncière (statut de fermage, préemption privée, attribution préférentielle) et l'incitation à l'exploitation des terres (décision administrative de réaffectation des exploitations abandonnées, impôt sur la détention foncière, groupement foncier agricole, préemption publique, politique de crédits, mesures sociales) se sont imposées en avantageant l'exploitant agricole, et en attribuant à l'Etat un rôle central dans la gestion du foncier agricole. Mais qu'en est-il de la gestion économique du foncier agricole dans le secteur privé de l'Etat en Algérie ? Nous devons rappeler que la gestion du foncier agricole dans le secteur privé de l'Etat est toujours soumise à la loi 87/19. Celle-ci interdit la vente et la location de la terre, mais aussi impose la forme de production collective dans les Exploitations Agricoles Communautaires (EAC). Or, en réalité, nous assistons à la location clandestine, mais aussi à la parcellisation informelle. Deux phénomènes qui montrent que la loi 87/19 n'est pas respectée. Autrement dit, la gestion du foncier agricole échappe à la gestion de l'Etat et suit une forme informelle qui ouvre la porte à des échanges économiques qui ne sont pas a fortiori néfastes pour le développement agricole, mais qui risquent de mener vers des dérapages : les échanges informels ont pour principe le partage des intérêts mutuels en occultant les considérations et les contraintes liées à la préservation des ressources naturelles (terre, eau, plantations…) qui sont souvent négligées lors de ces échanges et transactions. Par conséquent, il est tout à fait risqué de laisser durer l'informel même si celui-ci peut paraître une issue et une opportunité pour les agriculteurs qui se réfugient dans des solutions et des formules « hors-la-loi » pour dépasser les contraintes et résoudre les difficultés qui se posent sur le terrain. Il revient ainsi à l'Etat de réinstaurer la transparence et d'introduire une politique qui favorise l'effort et la sécurisation foncière dans le but d'instaurer progressivement une gestion économique du foncier agricole qui libère les initiatives, et qui place l'Etat et l'exploitant au centre de la gestion économique du foncier agricole en conciliant les intérêts des agriculteurs avec l'intérêt de l'Etat par le respect des règles qui reflètent la politique foncière et agricole. Un jour, peut-être, l'Etat trouvera sa raison et ses moyens, et le mérite s'imposera enfin. Une finalité qui doit transiter nécessairement par la volonté politique.