L'usine Gini est située dans la petite localité de Fréha, à 130 km d'Alger, entourée des bras chaleureux de la Haute Kabylie. L'effet de surprise est inévitable. Comment une usine connue de par les quatre coins du pays puisse se trouver dans cette petite bourgade, loin des grands pôles industriels ? Hocine Naït Kaci, directeur général, n'est pas surpris par la question. « Il était évident pour nous de commencer là où nous avions déjà un terrain. Il nous était impossible d'avoir à l'époque un terrain pour investir, et le meilleur, il est même heureux qu'on nous autorise à implanter une usine sur notre propre terrain. Il fallait une autorisation de la wilaya, un agrément, des démarches que nous avons entamées en 1984 pour aboutir au démarrage de l'activité en 1987, soit trois ans après », explique notre interlocuteur en notant que « ce lieu reflète la politique du pays en matière d'investissement ». Les capacités de l'usine sont en effet plus ambitieuses que l'espace qui lui est réservé. Construite en étages, l'usine Gini obéit malgré son étroitesse aux normes d'hygiène et de fabrication en chaîne de la crème glacée. Dotée d'un laboratoire d'analyses microbiologiques, le contrôle en amont et en aval de la fabrication est assuré au quotidien. Gini est une entreprise en pleine et constante croissance. Présente sur le territoire national en matière de distribution, Gini Glace jouit de la première place sur le marché en matière de capacité de production. « Nos parents étaient déjà dans le domaine, notamment celui du froid, nous avons repris le flambeau en misant sur un investissement important et en profitant de l'ouverture opérée en 1998. Nous avons sollicité des crédits bancaires qui nous ont permis de mettre notre savoir-faire en valeur », explique Naït Kaci en notant que « petit à petit, Gini a pu étaler son réseau de distribution à toute l'Algérie ». « A Alger, nous sommes deux ou trois glaciers qui se talonnent, mais dans le reste du pays, je pense que nous avons une large avance ». Gini a investi depuis l'année 2000, pratiquement 150% de ses gains, soit 60 milliards de centimes dont 20 à 30% assurés par la banque. Le retour n'a pas tardé à se faire jour avec un chiffre d'affaires qui connaît une évolution de 10 à 15% par année depuis 2000. « En 1999, on était à 20 millions de dinars, aujourd'hui en 2007, nous prévoyons 300 millions de dinars. L'année passée c'était 220 millions de dinars, nous comptons atteindre les 30% de plus. C'est une flèche qui monte », assure le directeur général de Gini. Son entreprise a un réseau qui couvre les wilayas de Annaba, Constantine, Batna, Béjaïa, BBA, Alger, Tizi Ouzou, Chlef, Tipaza, Oran, Tlemcen et Saïda. La distribution au niveau de la région du sud du pays est assurée par un dépôt au niveau de la wilaya de Ghardaïa : « C'est le plus timide rendement de mes distributeurs, car les gens du Sud sont peu portés sur la crème glacée contrairement à ce que l'on puisse penser », dira Naït Kaci Hocine. Le respect de la chaîne de froid est le souci majeur de Gini. « Je contrôle personnellement cet aspect. On est arrivé à mettre des thermomètres témoins à l'intérieur des camions qui, à l'arrivée, nous permettent de dire si la température a été respectée pendant le trajet. » « Certains opérateurs ne jouent pas le jeu » Pour Hocine Naït Kaci, le défi d'un glacier c'est de faire un produit de qualité qui soit irréprochable en termes de respect des normes : « Il existe malheureusement des confrères qui ne jouent pas le jeu, pour qui la fin justifie les moyens que ce soit au niveau de la qualité que du prix. Quoi qu'il en soit, moi j'ai opté pour la qualité, même si je dois réduire de ma marge, je tiens à ce que mon produit réponde aux normes. » Il qui précise que même si le prix du lait va connaître des hausses, il continuera à mettre la même quantité de 220 kg de lait dans une préparation à raison de 15 préparations par jour pour un prix de 7000 à 8000 DA le sac de lait : « Il suffit que j'enlève un sac et je dévierai de ma stratégie. » Gini dont l'ascension n'a plus de bornes, participe en termes de contribution à la commune de Fréha à hauteur de 15 millions de dinars. « Si les pouvoirs publics ne se disent pas qu'un opérateur économique est un partenaire, je ne pense pas qu'on puisse avancer ». M. Naït Kaci déplore la vision répressive qu'adoptent certains organismes publics vis-à-vis des opérateurs privés. « Au niveau de la commune, on refuse de nous vendre un autre terrain pour nous agrandir, nous avons donc décidé d'aller ailleurs. Notre souci c'est d'être conformes aux normes européennes. Nous nous devons d'avoir une station d'épuration d'eau et l'espace que nous avons à Fréha n'est pas suffisant. Nous avons sollicité un terrain du côté de Oued Aïssi, nous attendons la réponse de l'administration », nous dit le gérant de Gini. Il souligne que la notoriété de son produit fait qu'au niveau des détaillants la donne a changé, ce n'est plus les distributeurs ou le détaillant qui exigent quelle marque de glace commercialiser, mais c'est le client qui vient demander sa glace préférée. « J'ai constaté cela au niveau d'un commerce, où le congélateur de Gini a été utilisé pour des glaces d'une autre marque. C'est un client qui a découvert la fraude en exigeant d'avoir des cornetto Gini. Certes, le client est de plus en plus exigeant en matière de qualité, mais ce n'est pas suffisant, les services des fraudes devraient agir dans le sens d'interdire ce type d'arnaque où le contenant d'une marque est utilisé pour le contenu d'une autre marque. » Gini Glace a des ambitions et compte bien les atteindre. « Si le projet de Oued Aïssi sera effectif, nous comptons transformer l'unité de Fréha en unité spécialisée dans les glaces de luxe. Utiliser le savoir-faire artisanal pour la préparation de desserts, tartes, truffes, hérisson. Il faut bien se préparer à l'ouverture du marché aux grands glaciers internationaux », dira Naït Kaci.