Le gouvernement de François Fillon se serait bien passé de cette nouvelle polémique. Le Premier ministre apporte un soutien très mesuré à son ministre chargé de l'Immigration. Paris. De notre bureau Depuis mardi, l'Assemblée nationale examine le projet de loi de Brice Hortefeux sur la « maîtrise de l'immigration ». Un amendement a été ajouté à ce texte qui prévoit que les autorités consulaires françaises pourront inciter les étrangers désireux de faire venir leur famille en France à fournir un test — réalisé à leurs frais — prouvant leur lien de parenté. Le gouvernement semble craindre que la polémique autour des tests ADN n'occulte le reste du projet de loi. Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration, s'est attelé à déminer le terrain, jugé dangereux politiquement. « Il ne s'agit évidemment pas, contrairement à ce que j'ai pu lire ici ou là, de pratiquer on ne sait quel fichage génétique des candidats à l'immigration familiale, déclare-t-il. Il s'agit simplement de recourir à une technologie moderne permettant à une personne volontaire de prouver sa filiation lorsque les documents d'état civil ne le permettent pas », explique-t-il. Dans la soirée, Matignon annonce que le gouvernement est prêt à accepter l'amendement Mariani, à condition que la mesure soit assortie d'une période expérimentale de deux années, et que le coût du test soit remboursé par l'Etat « si la filiation est bien établie ». Pour l'instant, François Fillon et Brice Hortefeux, qui souhaitent que l'amendement soit atténué, n'arrivent pas à convaincre jusque dans leur propre camp. Très remonté contre cet amendement, Jean Leonetti offre une issue de secours à sa majorité. « En 2004, lors de l'examen de la loi sur la bioéthique, nous avons considéré que les tests ADN ne pouvaient être utilisés à des fins autres que médicales. Or c'est précisément le cas ici. Il n'est pas interdit de changer d'avis mais il me semble que nous devrions attendre l'examen du prochain texte sur la bioéthique en 2009 pour réaborder ce sujet. » « Pour moi, ça s'apparente à un tatouage électronique. C'est effroyable », s'offusque le villepiniste Jean-Pierre Grand. La gauche se saisit du sujet et en fait un devoir « moral ». Dans son intervention pour le groupe socialiste, Serge Blisko s'est insurgé contre cette disposition. « Quel étranger pourra se payer de tels tests ? », a-t-il demandé au ministre, ajoutant qu'en France, « ce n'est pas le sang qui fait la filiation ». « En vérité, l'amendement Mariani procède d'une logique de suspicion des immigrés que l'on irait donc désormais traquer jusque dans leurs gènes. Il est vrai qu'il est plus facile de jeter l'opprobre sur les immigrés que de s'attaquer aux problèmes que rencontre la France. Cela étant, en ce qui concerne tous ceux qui sont attachés à préserver la possibilité d'un débat serein et rationnel sur l'immigration, une seule réponse s'impose dans la polémique créée par l'amendement Mariani : le retrait pur et simple de ce dernier. Car, si je veux bien concevoir qu'il n'y a pas de tabou en matière d'immigration, il n'en demeure pas moins qu'il existe des valeurs sur lesquelles la République ne peut pas transiger en intégrant dans son ordre juridique des mesures discriminatoires et populistes », analyse Dominique Sopo, président de SOS Racisme.