En ces temps de grande confusion, tant idéologique que politique, des voix s'attellent à remettre les pendules à l'heure. Rédha Malek nous rappelle, dans un entretien publié hier par El Watan, que l'Occident a progressé grâce à l'essor de la science et de la démocratie, à l'inverse des musulmans restés dans la décadence et la stagnation car contraints de vivre sous des régimes politiques despotiques, loin de la science qu'ils avaient développée. Rédha Malek a mis le doigt sur l'essentiel de la grave crise qui agite le monde arabo-musulman, dont la manifestation la plus grave et la plus spectaculaire est l'apparition à large échelle d'un terrorisme particulièrement ravageur fait au nom du djihad. Ce vocable que Ghaleb Bencheikh, autre penseur éclairé, estime dans une analyse parue dans El Watan être « piégé ». Il constate que ce sont les hommes et les femmes immergés dans la foi islamique à travers le monde qui sont directement atteints dans leur chair et leur cœur par les attentats meurtriers et abjects. De ce fait, il interpelle les oulémas contemporains à « épuiser la capacité de nuisance » de la notion de « guerre sainte » mais à condition qu'eux-mêmes opèrent une « révolution mentale et spirituelle ». Un travail sur soi et sur les interprétations des textes sacrés, Rédha Malek le demande, de son côté, mais aux hommes politiques : les moyens sécuritaires pour lutter contre le terrorisme sont nécessaires mais pas suffisants, ils doivent estime-t-il se tourner vers l'Islam des lumières, celui qui met en relief les sciences modernes et développe la tolérance et l'ouverture. Le secrétaire général de l'ANR juge dans ce domaine insuffisants les efforts du gouvernement algérien qui cultive, à ses yeux, une position ambiguë, « mi-figue, mi-raisin ». Certainement, dans le même état d'esprit qu'en 1993 lorsqu'il avait lancé la formule « la peur doit changer de camp », il ne constate pas de progrès dans la lutte idéologique contre l'extrémisme religieux notamment au niveau de la sphère politique et au sein des institutions éducatives. Il convie de ce fait le gouvernement à « l'école de l'Islam éclairé ». Quelles chances pour que de telles voix — rares — puissent se faire entendre, tant la chape de plomb qui pèse sur les pays arabo-musulmans est lourde ? Soucieux de leur seul maintien au pouvoir, les régimes politiques sont trop éloignés de la démocratie et de la science. Et ce pouvoir, les fondamentalistes le leur disputent, au nom de la religion qu'ils se sont appropriés en imposant par la terreur leur propre interprétation. Les dégâts sont incommensurables et le temps perdu trop important. Il y a risque malheureusement que le monde qui s'ouvre devant nous sera celui des enfants de quinze ans qui se font exploser au milieu de foules.