Attendue depuis plus de dix ans, annoncée maintes fois par l'actuel gouvernement comme étant « imminente », la révision des codes communal et de wilaya n'aura finalement pas lieu. Pas dans les délais fixés au préalable. Les nouveaux textes réglementaires attendront donc et peut-être plus que de rigueur, à en croire notre confrère El Khabar qui rapportait, dans son édition d'hier, les surprenantes déclarations de Noureddine Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales. Le gouvernement qui s'était pratiquement engagé à rendre effective la révision desdits textes avant la tenue des élections locales du 29 novembre fait faux bond et renvoie, une fois encore, aux calendes grecques la réforme tant attendue. La « priorité » Le ministre de l'Intérieur qui comparaissait samedi devant la commission des finances de l'Assemblée nationale a étonné son monde en déclarant que la révision des codes communal et de wilaya (promulgués en 1967) n'est pas « une priorité dans l'immédiat ». La « priorité », selon lui, est la « réforme de la fiscalité locale » que le gouvernement doit faire aboutir afin de « faciliter la tâche aux élus locaux ». Le ministre de l'Intérieur, qui faisait, il y a peu, de la révision des codes communal et de wilaya son cheval de bataille et passait pour un de ses plus ardents défenseurs, effectue, sans vaciller, un spectaculaire revirement. A moins de 40 jours de l'élection des assemblées communales et de wilaya, ce changement inopiné de cap suscite de nombreuses interrogations. D'abord, il serait intéressant de savoir si le chef du gouvernement, et secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, partage le même « ordre des priorités » que son ministre de l'Intérieur et tout puissant patron de l'Administration. D'autant plus que la « guerre ouverte » entre les deux hommes remonte à plusieurs mois et vire presque au ridicule. La preuve en a été donnée la semaine dernière. Les services du ministère de l'Intérieur ont publiquement « désavoué » à travers un communiqué officiel le… chef du gouvernement. Abdelaziz Belkhadem aurait « promis » mercredi dernier au secrétaire national du FFS, Karim Tabou, de mettre au pas l'Administration, « coupable », selon le FFS, de manquements graves lors du traitement des listes électorales. L'initiative de Belkhadem a été très mal reçue par le département de Zerhouni. Les « frictions » entre le chef de file du parti majoritaire à l'Assemblée et le ministre de l'Intérieur dépassent de loin ce cadre-là. La « mouture » finale des codes communal et de wilaya est également l'un des principaux points de discorde entre les deux membres de ce même gouvernement. Si le premier défend les « orientations » de son parti, à savoir davantage de prérogatives pour les élus, le second penche plutôt vers un accroissement des pouvoirs des agents de l'administration. Deux visions qui s'affrontent « vertement » pour le contrôle des assemblées locales. L'intervention d'hier du ministre délégué aux Collectivités locales, Daho Ould Kablia, sonne comme un « rappel de priorité ». Pour signifier l'urgence de la « réforme », il affirme en marge de la rencontre gouvernement-walis (propos recueillis par l'APS) que le nombre des élus locaux en fin de mandat poursuivis par la justice a « atteint 450 élus ». dysfonctionnement structurel Ajoutant que la « majorité » a été acquittée. Partisan d'une refondation globale de l'organisation des collectivités locales et des textes les régissant, Daho Ould Kablia a eu déjà à exprimer son « soutien » et sa préférence pour la mouture du code communal défendue par son chef du gouvernement. Lors de la conférence des cadres du FLN, organisée fin août dernier à Alger, M. Ould Kablia a été invité par le patron du FLN et a dressé un constat sévère de la gestion des collectivités locales. Les assemblées locales élues souffrent, a-t-il déclaré, de dysfonctionnement structurel affectant négativement la qualité du service public. D'où, selon lui, l'urgence de « revoir le code communal ». Pour illustrer le blocage affectant les assemblées, il fait appel aux statistiques. Durant l'actuel, mandat des APC et APW, souligne le ministre délégué, il est fait état de 368 élus APC démissionnaires, dont 73 P/APC et 110 élus des assemblées de wilaya. Il critiquera les dispositions de l'article 55 du code communal actuel relatif aux modalités du retrait de confiance des présidents des assemblées locales. Il mettra en outre l'accent sur la « faiblesse » de représentativité des citoyens dans les communes de moins de 30 000 habitants qui constituent la majorité des communes, représentées par seulement « 7 élus ». Les organigrammes et les tableaux des effectifs sont « désuets », estime-t-il. A propos de la fiscalité locale, il a indiqué que celle-ci « doit être repensée pour mieux doter la commune de moyens financiers conséquents ». Dans le même ordre d'idée, il rappellera que l'Etat a consenti, entre 1999 et 2003, 22 milliards de dinars pour prendre en charge les dettes des communes. « Pour 2007, la dette serait passée malgré cet effort à 116 milliards de dinars. » Autant d'arguments donc pour accélérer le rythme de la réforme. Le gouvernement Belkhadem, pourtant au fait de la situation intenable des communes et des wilayas du pays, semble privilégier l'immobilisme à l'action.