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« Un partenariat spécial nous lie à l'Algérie »
Ugo Intini. Vice-ministre des Affaires étrangères italien
Publié dans El Watan le 14 - 11 - 2007

Ugo Intini est l'un des spécialistes du monde arabe qui, en trois décennies de politique, a eu à affronter les grandes questions internationales, notamment celles qui concernent directement le monde arabe. Journaliste de formation, il a occupé la fonction stratégique de porte-parole de l'ancien chef du gouvernement, Bettino Craxi, sous le règne socialiste. Le vice-ministre Intini a été également l'un des leaders historiques du Parti socialiste italien et l'un des fondateurs du nouveau parti des socialistes italiens. A 66 ans, il est nommé bras droit du chef de la diplomatie Massimo D'Alema, avec qui il partage une vision ouverte sur le partenariat en Méditerranée, avec le souci permanent d'y impliquer davantage les pays arabes de la région.
Qu'est-ce qui a motivé la décision de tenir un sommet bilatéral, suivant la pure tradition européenne, entre le président Abdelaziz Bouteflika et le président du Conseil italien, Romano Prodi ?
Nous considérons la coopération entre l'Italie et l'Algérie un partenariat qui renforce nos deux pays. Notre vision des échanges entre les deux rives de la Méditerranée passe par ce genre de synergie bilatérale. A l'Algérie nous lient des facteurs historiques, et nous prévoyons un grand futur à notre coopération. Un partenariat spécial. Pas seulement dans le domaine très important, certes, de l'énergie, ressource que l'Italie ne possède pas, mais aussi dans celui de la petite et moyenne entreprises. Nos opérateurs économiques sont attelés à la réalisation de plusieurs projets économiques en Algérie pour tirer profit de la privatisation des PME. Nous sommes conscients que l'Algérie est un pays qui regorge de richesses matérielles mais surtout humaines. C'est une société jeune qui, grâce à la stabilité du pays et à la sécurité, peut drainer des flux d'investissements importants.
Le choix de la Sardaigne, pour cette rencontre entre le chef de l'Etat et votre Premier ministre, est lié au projet de réalisation du deuxième gazoduc « Galsi » ?
Le partenariat entre nos deux pays, je le répète, peut s'étendre sur de larges secteurs afin de développer de grandes capacités économiques, sous forme de joint-ventures et autre. Dans le domaine de l'énergie, ce projet est perçu par les Italiens comme un moyen de nous garantir plus de sécurité énergétique. En tant qu'Européens, on doit investir davantage pour concrétiser ce rêve. Les échanges gaziers représentent le futur de notre coopération, qui remonte à loin dans l'histoire. J'étais enfant, je m'en rappelle encore, quand j'ai découvert la guerre d'Algérie. Même la société ENI a joué un rôle de soutien à cette guerre de libération. Certains de ses responsables étaient des porteurs de valise, avec la bénédiction de leur patron Enrico Mattei. Nous voulons soutenir des initiatives qui renforcent aujourd'hui davantage cette amitié. Vous savez que la mairie de la ville de Gênes est très enthousiaste à l'idée de jumeler son port avec celui de la ville de Jijel.
Que pensez-vous de l'idée lancée par le président français, Nicolas Sarkozy, de fonder « l'union de la Méditerranée » ?
Notre stratégie de politique étrangère et notre vision d'un partenariat particulier en Méditerranée visent à instaurer une coopération très étroite avec la rive sud. Depuis le lancement du processus de Barcelone, qui connaît une crise, nous œuvrons à tracer des chemins alternatifs. On doit relancer ce partenariat, c'est indéniable. S'il le faut avec des institutions nouvelles, si on n'arrive pas à remettre en marche celles qui existent déjà. Si Sarkozy avance une proposition allant dans ce sens, il s'agit de propos sages. Pour le moment, il n'y a pas encore de plan précis avancé. On cherche à mieux le définir, en soulignant les priorités.
Plusieurs gouvernements européens (français et espagnol) semblent amorcer un revirement dans leur position sur le conflit au Sahara occidental. Votre gouvernement maintiendra-t-il son soutien au Front Polisario ?
Pour résoudre cette question, il faut investir dans les textes des résolutions de l'ONU. Le Front Polisario et le gouvernement marocain doivent se parler, prendre la peine de négocier. Il faut toutefois rester très prudent et ne pas entrer dans les aspects spécifiques d'un accord, tenter d'affronter le sujet avec une vision globale. Il faut dire que pendant que nous, l'Italie et la France, on parle d'un partenariat spécial avec l'autre rive de la Méditerranée, on ne peut ne pas penser au Maghreb. L'Algérie et le Maroc sont condamnés à mettre au point le même genre de développement. La lutte contre le terrorisme interne, par exemple, est une affaire commune. Le degré de prospectives de progrès en Europe et le partenariat spécial avec le Maghreb doivent trouver dans la rive sud une cohésion, comme celle qu'on a instaurée au sein de l'Union européenne. On a fait un parcours d'intégration régionale qui peut être suivi par les pays du Maghreb. Notre désir de pouvoir élargir nos échanges et faire parvenir nos exportations vers d'autres régions du monde repose sur cela. Dans ce contexte, le conflit au Sahara occidental est anachronique. Il s'agit d'une lutte qui a des conséquences néfastes qui bloquent le progrès au Maghreb. Il faut un effort de tous pour mettre un terme à cela. Maintenir cette crise, à l'aube du deuxième millénaire, est une réalité dépassée par le temps. Une solution doit être trouvée en multipliant les efforts dans ce but.
Le gouvernement italien de gauche reste attaché à la création d'un Etat palestinien indépendant. Hier encore, on a assisté au déchirement entre Palestiniens...
La politique suivie par l'Italie au Moyen-Orient se base sur deux principes : le premier consiste à garantir l'existence et la sécurité à Israël et le deuxième représente notre attachement à la position et aux raisons des pays arabes, et surtout aux droits des Palestiniens qui ont souffert énormément durant ces dernières années. Nous restons convaincus qu'il faut impliquer tous les Palestiniens dans les négociations pour la paix. La fracture entre le mouvement du Hamas et celui du Fatah nous a déçus, mais nous ne sommes pas résignés et nous n'épargnerons aucun effort pour éviter la guerre civile entre Palestiniens. Nous pensons que toutes les crises au Moyen-Orient sont liées entre elles. Le conflit israélo-palestinien, celui sur le Golan, ainsi que la situation en Irak, la question des Kurdes et le dossier nucléaire iranien.


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