Une clôture marquée par la présence du ministre de la Culture, Mohamed El Aziz Ben Achour. Dans un bref discours prononcé en langues arabe et française le directeur des JTC, Mohamed Driss, rappellera les idées force guidant cette manifestation placée sous le signe et du thème« La volonté de vivre de Abou El Kassem Echabi à Mahmoud Derwiche ». Un finish éloigné des apparats laissant place, au bout de 15 mn, au spectacle palestinien. Une fresque poétique puisée des textes de Mahmoud Derwiche intitulée Djadiria, racontant la vie, sa patrie, son peuple, celui des immortels. Le poète parle au monde et aussi à sa mémoire qui l'accompagne toujours. Un spectacle poignant d'une grande esthétique ! L'œuvre tunisienne comme Les fleurs printanières, comme les leurs automnales, interprétée par une pléiade de jeunes comédiens tunisiens est une parabole chantée et dansée. Danses modernes, mouvements chorégraphiques et bouts de chansons rythment cette pièce sans dialogues. Pour les besoins de sa réalisation bruyante, le metteur en scène, Ridha Drira, a collaboré avec l'institut de musique de la ville de Sousse. Une œuvre sans échange de paroles mais irriguée ici, et là, de vieux airs importés des Hauts-Plateaux de Sétif, Les fleurs printanières… peut se résumer en un fougueux et long exercice physique collectif, animé par des personnages qui jouent plus avec leur corps que des autres registres constituant l'acte théâtral. Leurs cris sporadiques, les croisements de jambes et des mains proches des techniques utilisées chez les acrobates du cirque, sont les principaux moteurs d'action dans cette pièce de saison qui n'a ni début ni fin. Une pièce qui finit par se mordre la queue tant les exercices corporels deviennent répétitifs, confus, inopérants auprès d'un public quelque peu perdu par des lâchers de fumée et des lumières blafardes de projecteurs sombres comme une marche funéraire. C'était l'overdose. Toujours dans le cadre des 13es Journées théâtrales de Carthage, la pièce libyenne Arrêt, produite par le théâtre national de la ville de Benghazi, propose une technique moins mouvementée que celle de la Tunisie. Au lieu et place du mouvement rageur supposé parler du printemps et de l'automne, la pièce du guide du pays de Omar El Mokhtar opte pour une mise en scène très économe en déplacement, pour ne pas dire statique. La théâtrale à deux voix, intervient par allégorie, d'exprimer l'amère réalité dans laquelle se trouve le monde arabe à travers un personnage cloué sur son fauteuil, du début à la fin de ce spectacle de… 30 minutes et quelques poussières dégagées par un incommodant fumigène. Là également, l'ambiance sur le plateau de la salle Ibn Rachik est sombre, les lumières sont grises, les rideaux gris, les costumes des deux comédiens (un homme et une femme) gris. Arrêt tente de tout dire mais s'emmêle les pénates, le tout sur fond de guerres, de sacrifices et de lâchetés partagés. En fin de compte, les comédiens n'avaient que leurs impuissances à proposer car ligotés dans une mise en scène réfractaire à tout soupçon d'éclatement. La salle du centre universitaire Bouzaiène accueillera en soirée Les nègres, une pièce adaptée par une troupe sénégalo-italienne, à partir d'un texte de Jean Genet. En quelques mots, le contenu initial de l'œuvre de l'écrivain français raconte la condamnation à mort d'un noir pour le meurtre d'une femme blanche. Les coreligionnaires de l'accusé réagissent à cette condamnation et c'est le début d'un autre procès, d'une autre bataille. C'est à l'intérieur de ce conflit, entre noirs et blancs, qu'intervient le metteur en scène italien pour essayer de proposer un long voyage dans le long rituel africain. La tentative ne fait pas long feu. Gustavo Frigério a mis de côté l'essence, la sève qui vient de l'intérieur pour ne se contenter que de l'écorce. La structure du texte originel est rapidement vidée de sa substance dramaturgique, pour ne laisser la place qu'à l'exotisme des danses et des chants africains primitifs. Le texte-socle n'est en fin de compte que prétexte à l'étalage de quelques techniques modernes imparfaitement assimilées. L'hypocrisie du monde blanc que voulait démonter et démontrer l'auteur de Les Paravents et Les Bonnes est diluée dans un art saupoudré de croyances technicistes, un art approximatif, caricaturé. Les va-et-vient, entre la quête de la mémoire et le réquisitoire, ont rendu les motifs du départ méconnaissables. On a écrit une autre pièce alors qu'il était question de trouver des passerelles. Ce ne fut pas le cas. Les comédiens jouaient au-dessous des genoux. La reconstitution de mémoire était une perte de repères qu'autre chose. C'était dommageable et c'était dommage. Sur le versant des activités annexes des journées théâtrales, le poète indomptable Mahmoud Derwiche a ravi l'esprit des amoureux de la poésie engagée. Dans le silence quasi religieux de la salle du théâtre municipal de Tunis, la voix du poète s'est élevée, haute, très haute pour rencontrer les étoiles de la rébellion, la magnificence intrinsèque de la beauté du mot immortel. L'ascension est forte, désirée pour barrer la route aux despotes des patries confisquées et de tous ceux qui actionnent les bombes pour faire peur aux enfants. Quelques extraits du poème rebelle : « Oh mort attend à l'extérieur de la terre. Attends-moi dans tes contrées, le temps que j'achève une conversation passagère avec ce qui reste de ma vie, de la patrie triste et de l'obstination des figuiers et des oliviers, face au temps et à ses amnésies. »