Les pèlerins algériens défrayent, cette année encore, la chronique mecquoise à travers le nombre impressionnant d'égarés à la sortie des hôtels de leur hébergement ou encore en quittant le Masdjid Al Haram. La Mecque (Arabie Saoudite). De notre envoyé spécial Ils étaient jusqu'à hier quelque 728 hadjis à avoir perdu la « qibla » de retour de la mosquée sacrée. Signe de l'ampleur de ce phénomène, le bureau d'accueil des « taïhine » (les égarés) est le service qui travaille le plus après le centre de santé. La salle aménagée dans le siège de la mission algérienne du hadj ne désemplit pas du matin au soir et même jusqu'au petit matin. Il y a en effet toujours un homme ou une femme – des vieux pour la plupart qui traînent sans trop savoir où aller dans les ruelles de Makkah. Assez souvent ce sont des étrangers qui les ramènent au siège de la mission (la biâtha) en les reconnaissant à leurs badges sur lesquels sont inscrits leurs noms et leur nationalité. Mais il y a encore des hadjis égarés qui ne disposent d'aucun papier et, plus grave encore, ne savent même pas communiquer en arabe classique, mis à part le mot « Al Djazaïr » qu'ils arrivent à baragouiner. Pour certains, c'est le vocable qui sauve en ce sens que les forces de l'ordre saoudiennes les raccompagnent au siège de la biâtha. Pour d'autres, ils ne leur reste que leurs yeux pour pleurer de désespoir. Et dans la majorité de ces cas, les concernés sont victimes de vols – assez courants ici – et perdent leur argent et leurs papiers. Et c'est en pleurant qu'ils attirent l'attention des policiers ou de simples hadjis des autres pays qui les ramènent au QG algérien. Pour la journée d'hier, pas moins de 21 personnes ont été délestées de leur pécule et bien sûr de leurs papiers suite à des vols à la tire. Et la tendance va crescendo, en ce sens que les quelque 22 000 hadjis arrivés à La Mecque sont dans leur grande majorité âgés de plus de 70 ans, constituant ainsi une « proie » facile pour ces rapaces qui rôdent dans la rue. Des images de hadjis algériens en larmes sont courantes ici à La Mecque. S'il est difficile de mettre un agent derrière chaque hadji comme le laisse entendre les responsables de la mission, il faut tout de même constater que l'encadrement laisse trop à désirer, comparé à ce qu'on peut observer chez les autres délégations. Rien en effet ne distingue le hadji algérien de ses semblables, sinon ce petit badge (pour ceux qui l'ont encore !) accroché à la tenue d'« el ihram » (foulard de sacralité). Quatre décès et 8 malades mentaux ! Le fait est que, dès qu'un égaré est signalé dans la rue, il s'agit presque fatalement d'un Algérien. En l'occurrence, toutes les délégations de hadjis des autres pays quittent leurs hôtels bien encadrées et en groupes en route vers la mosquée, les Algériens, souvent, « errent » seuls. Ceci est d'autant plus délicat pour des vieillards de 90 ans, qui plus, sont « analphabètes trilingues ». Le prix payé est d'ailleurs fort : trois hommes et une femme ont été terrassés par des arrêts cardiaques à cause, entre autres, de la fatigue et du stress. Et il semble bien que la leçon de l'année dernière n'a pas été retenue dans le choix des hadjis. Encore une fois, les personnes très âgées constituent le gros des troupes des pèlerins algériens. Une bonne partie d'entre eux arrive avec des pathologies chroniques qui rendent l'accomplissement du hadj tout simplement aléatoire. Jusqu'à hier, pas moins de 9457 consultations ont été effectuées dans le centre de santé de Makkah. Il a été enregistré 37 hospitalisations dans les hôpitaux saoudiens et 136 autres maintenus en observation. Mais au-delà des maladies courantes dans le climat caniculaire de Makkah, on relèvera avec stupéfaction l'existence de 8 cas qui présentent des troubles mentaux… Ces personnes qui ne comprennent rien à ce qui se passe, étant coupées du monde des vivants, ont été envoyées au pèlerinage avec la mention RAS ! Les carnets de santé complaisance ont encore fait des ravages parmi les hadjis… Le chef du centre de santé qui déplore cette situation insiste pour que les 8 malades mentaux soient rapatriés au plus tard demain, tant son équipe est obligée de les surveiller de près. Dans le même ordre d'idées, la commission des fatawa (prédications) réunie lundi a donné son feu vert religieux pour le rapatriement de ces malades qui ne pourront accomplir les rites du hadj. Ces premiers couacs sont signalés alors que le plus dur est à venir avec l'ascension du mont Arafat qui passe pour être l'épreuve fatidique du pèlerinage en ce qu'elle exige comme efforts physiques que les frêles épaules de nos hadjis ne pourront supporter. A Dieu ne plaise.