Les premiers hadjis sont rentrés au pays dimanche dernier via le vol régulier d'Air Algérie en provenance de Jeddah. Elles étaient quelque 100 personnes, des hadjis VIP pour la plupart, qui ont eu le privilège d'éviter les bousculades et embarquer sereinement à bord du Boeing 737-800 de la compagnie nationale qui s'est posé à l'aéroport international d'Alger à 21h30. Et pour cause, ce furent en majorité des membres de la mission du hadj, quelques officiels dont le ministre de la Formation professionnelle, El Hadi Khaldi, et quelques « commerçants » qui ont eu la chance d'embarquer à bord de ce premier vol non destiné aux hadjis. En revanche, les premiers pèlerins sont arrivés hier en début d'après-midi à Alger, Oran et Constantine, suivant le programme arrêté par la mission et la compagnie Air Algérie. Ce sont notamment les hadjis qui sont partis aux Lieux Saints de l'Islam le 24 novembre dernier, soit un mois jour pour jour. Après avoir accompli la visite de Médine et de la tombe du Prophète (QSSSL), ces derniers avaient rejoint Mecca pour accomplir les rites du hadj avant d'effectuer le tour d'adieu de la Kaâba. L'autre moitié qui avait rejoint tardivement les Lieux Saints devra faire le chemin inverse, à savoir rejoindre Médine pour y faire la visite après avoir accompli le hadj. Ils devront ainsi eux aussi s'établir un mois durant pour espérer embarquer vers la mi-janvier. Au total, ce sont quelque 165 vols de la compagnie nationale Air Algérie ainsi que la Saoudian united Airlines qui sont programmés pour rapatrier nos 35 800 pèlerins recensés sans compter ceux qui sont partis en formule dite « libre ». La mission a échoué, cap sur l'office Le délégué régional d'Air Algérie à Jeddah, Abdelkader Yahiaoui, qui suivait personnellement le déroulement des opérations, craint déjà les grandes foules à compter d'aujourd'hui. « Cela va être très dur à gérer ! », confie-t-il, précisant qu'il y a énormément d'impondérables à prendre en compte dans ce genre de travail. Lui et ses équipes seront pratiquement sur le pied de guerre jusqu' au 16 janvier, date du dernier vol, « si tout va bien ». Ceci pour la logistique. Côté prise en charge des hadjis, il y a bien sûr à boire et à manger... La mission algérienne du pèlerinage aura prouvé une fois de trop son incapacité à gérer la situation et à veiller au confort de ses « vieux clients ». En plus du fait que le hadj est une épreuve physique difficilement supportable pour nos vieux, les conditions générales de prise en charge laissent trop à désirer pour une mission qui se répand en satisfecit chaque année. Nous avons ainsi assisté à plusieurs reprises à des cas de non-assistance à hadji en danger. Que ce soit au niveau de l'orientation spirituelle, de la restauration ou encore de l'hébergement, la mission aura brillé par une extraordinaire nonchalance. Ici, malheur pour celui qui n'est pas accompagné de l'un des siens ou qui n'est pas « recommandé ». Le fait est que le commun des hadjis passe pratiquement incognito dans le siège de la biâatha. Très souvent, ce sont des étrangers qui ramènent des hadjis égarés sous le regard indifférent des membres de la mission arborant pourtant ostentatoirement les gilets bleus à l'effigie de celle-ci. Ereintés, beaucoup parmi ces malheureux hadjis, qui ont perdu la direction de leur hôtel, passent des journées à la mission sans que personne ne s'en soucie. Le petit bureau des égarés qui y est aménagé est de loin le service le plus actif de la mission après le centre médical. Au fil des jours, le nombre de 1000 égarés algériens a été largement dépassé. Le bureau des « taïhines » ressemble à une espèce d'asile pour vieillards en guenilles physiquement très éprouvés. Ce spectacle, pas très beau à voir pour des âmes sensibles, contraste terriblement avec les mines plutôt joyeuses de ces « encadreurs » de la mission censés voler au secours de ces hadjis en détresse. Tout se passe comme si ces gens ne sont pas concernés par ce boulot alors qu'ils sont grassement payés pour cela (ils perçoivent 160 rials, soit près de 60 euros par jour) en plus de leurs salaires et bien sûr — cerise sur le gâteau — un pèlerinage aux frais de la princesse. C'est que l'argent coule à flot dans la mission du hadj et ce ne sont pas forcément nos vieux qui ont payé près de 30 millions de centimes qui en tireront profit. A quelques jours de la fin du pèlerinage, sans doute la dernière opération pour la mission qui devra être dissoute, les appétits s'aiguisent ici au siège la biâatha à La Mecque sur la présidence du fameux office indépendant du ministère des Affaires religieuses qui devrait gérer à compter de l'année prochaine le hadj, conformément à un décret exécutif adopté récemment. Bien que le bilan de leur gestion soit catastrophique, les missionnaires ne cachent pas leur volonté de faire main basse sur le futur office. Pour cela, il n'y a pas meilleur moyen que de se plier en quatre devant quelques officiels dans l'espoir de se faire adouber. Il reste à savoir si le président de la République, régulièrement informé des ratages et autres constats de carence de la mission, est prêt à garder une équipe qui perd... Pour cause, il y va du confort de nos hadjis, mais surtout de l'image de marque de notre pays que la biâatha n'a pas forcément bien défendue, loin s'en… fout.