Une conférence de presse a été organisée hier au Centre international de presse (CIP) sur la protection des parcs du Tassili et de l'Ahaggar, animée par Omar Batrouni, directeur du patrimoine au ministère de la Culture, Ambéze Hocine, directeur de l'Office du parc du Tassili, et Malika Hachid, archéologue, ex-directrice du parc national du Tassili des Ajjer, férue du Sahara en général et du Tassili en particulier, une région qu'elle a parcourue à pied et à dos de chameau depuis plus de vingt ans. Une occasion pour tirer encore une fois la sonnette d'alarme sur la destruction des sites archéologiques sahariens, pourtant protégés par la loi algérienne et les conventions internationales. Le parc national du Tassili s'étend sur une superficie de plus de 80 000 km2. Il a été classé patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco et admis dans le réseau du MBA en qualité de réserve de l'homme et de la biosphère. En 1998, l'Algérie s'est dotée d'une loi sur la protection du patrimoine culturel conçue comme l'acte de réappropriation de sa mémoire, de son histoire et de sa culture. Les conférenciers sont revenus sur l'affaire des cinq touristes allemands. Ces derniers sont entrés régulièrement par la frontière algéro-tunisienne, le 15 novembre, munis d'un visa touristique délivré par l'ambassade d'Algérie en Allemagne suite à une invitation de l'agence de voyages Chelia Tour. La réglementation a été respectée jusque-là. Le guide a été ensuite embarqué dans un véhicule des Allemands : c'est une infraction car les guides doivent avoir leur propre véhicule. Arrivés à Djanet, le 15 novembre au soir, ils passent la nuit à l'hôtel Zriba. A 4h du matin, le 16 novembre, les touristes quittent l'hôtel sans leur guide. Ce dernier signale leur absence à la brigade de la gendarmerie. La patrouille ne les a pas repérés. Contacté, l'Office national du parc du Tassili met à la disposition des services de sécurité un agent de conservation. Les touristes, pour brouiller les pistes, avaient affirmé à leur guide qu'ils voulaient aller à Tadrart. A 14h, les recherches sont lancées. Deux jours après, le guide donne l'alerte car il n'a constaté « aucune trace fraîche sur la voie d'accès à Tadrart ». Les recherches sont réorientées vers le nord du parc avec l'appui de l'ANP (2 hélicoptères). On croit alors à un enlèvement. Les cinq touristes allemands ont été retrouvés dans l'erg Admer. Ils ont été conduits à Djanet et leur voiture expertisée. Les services de sécurité découvrent 130 objets enlevés de leur site de surface provenant de trois gisements différents, composés de bifaces, d'éclats de céramique, de 31 échantillons géologiques et de 58 potiches et d'une armature de flèche. « Ce n'est pas un ramassage aléatoire, mais organisé et réfléchi. Même si ces objets n'ont pas de prix précis, ils coûtent au regard de l'histoire et de l'Algérie », commente Ambéze Hocine. Les conférenciers ont affirmé que le pillage de notre patrimoine est une pratique courante. Certains touristes prennent des pierres comme objet de souvenir, mais d'autres alimentent carrément des réseaux. Il existe 524 sites internet spécialisés dans la vente illicite des objets archéologiques. Malika Hachid s'indigne de voir le patrimoine illicitement accaparé. Elle fustige « la mauvaise coordination entre les secteurs : ministères du Tourisme, de l'Environnement et des Finances ». Elle affirme qu'il faut élargir aux autres secteurs le comité intersectoriel créé par le ministère de la Culture pour « réfléchir ensemble, veiller à la sécurité des biens et des personnes et sauvegarder le patrimoine culturel ».