Le groupe américain Microsoft a présenté une offre de 44,6 milliards de dollars pour racheter le spécialiste de l'internet Yahoo, ce qui leur permettrait de mieux concurrencer Google. Un tel rapprochement constituerait la plus grosse opération dans le secteur depuis la fusion Time Warner-AOL en 2001, qui a depuis été un échec, notamment pour des raisons de différences de cultures d'entreprises.Yahoo a déclaré que son conseil d'administration allait étudier rapidement cette offre et agir au mieux pour ses actionnaires. Les spéculations allaient bon train depuis au moins un an sur un tel projet de rapprochement, nombre d'investisseurs jugeant logique une alliance Microsoft-Yahoo face à la montée en puissance ininterrompue de Google. Le cabinet spécialisé comScore estime que Google détient 77% du marché des moteurs de recherche sur Internet, contre 16% pour Yahoo et 3,7% pour Microsoft. Mais au-delà des moteurs de recherche, c'est évidemment le marché de la publicité qui motive les grandes manœuvres stratégiques dans le secteur. Microsoft estime lui-même que le chiffre d'affaires de la publicité en ligne devrait atteindre près de 80 milliards de dollars d'ici 2010, contre plus de 40 milliards en 2007. Mais le groupe souligne aussi que ce marché est « de plus en plus dominé par un seul acteur », une référence transparente à Google. Yahoo regroupe plus de 500 millions de visites par mois, avec notamment Yahoo Mail, premier service de courrier électronique grand public mondial. Mais le groupe perd des parts de marché face à Google. Le groupe a annoncé jeudi dernier que son président non-exécutif, Terry Semel, quittait le conseil d'administration, ce qui rompt les liens officiels de Yahoo avec son ancien PDG. Semel, à qui l'on fait crédit d'avoir donné un second souffle au groupe, avant de perdre la main, avait quitté son poste de PDG en juin. Yahoo s'est laissé distancer ces derniers temps dans la publicité par Google et par l'émergence de sites communautaires comme Facebook et MySpace. « Nous avons le plus grand respect pour Yahoo et, ensemble, nous pouvons offrir aux consommateurs, aux éditeurs et aux annonceurs une gamme de solutions encore plus attractive tout en renforçant notre position sur le marché des services en ligne », déclare dans un communiqué Steve Ballmer, le directeur général de Microsoft. Microsoft précise avoir identifié quatre domaines susceptibles de générer des synergies qu'il estime à un milliard de dollars par an au moins pour le nouvel ensemble. Le groupe fondé par Bill Gates se dit prêt à coopérer « étroitement » avec la direction et le conseil d'administration de Yahoo. Il assure que l'opération obtiendra toutes les autorisations réglementaires nécessaires. Paul Mendelsohn, stratège investissement chez Windham Financial Services, estime qu'une telle opération fait sens. « Yahoo a bien du mal à concurrencer Google », explique-t-il. « Pour ce qui est de savoir si le prix proposé est bon, je ne vois personne faire une offre supérieure à celle de Microsoft. » Tim Smalls, chez le courtier Execution LLC, est moins enthousiaste quant aux bénéfices d'un tel rachat : « C'est choquant ! La prime me semble exorbitante dans un secteur en baisse. Je ne vois pas comment les synergies entre Microsoft et Yahoo vont leur permettre de lutter contre Google. » Certains observateurs soulignent aussi les différences entre la culture d'entreprise de Yahoo et celle de Microsoft, et ils font valoir leurs nombreux doublons, notamment dans la messagerie instantanée ou la publicité. « Je ne serai par surpris si cette offre était relevée à l'avenir », estime de son côté Mark May, analyste chez Needham & Co. « Je pense qu'il y a des groupes comme Comcast ou Viacom et d'autres qui doivent encore se positionner face à l'émergence des médias en ligne et qui ne l'ont pas fait. Il y a donc clairement là d'autres sociétés stratégiques. » Reuters, Samir Ben Djafar