L'intersyndicale autonome de la Fonction publique a pu et su en l'espace de trois jours paralyser les secteurs les plus névralgiques du pays, notamment l'éducation, l'enseignement supérieur, la santé et l'administration publique. La grève de trois jours à laquelle a appelé cette structure nouvellement mise en place a été une grande réussite. Une réussite dans le sens où le mouvement de débrayage, qui a été largement suivi, a permis aux syndicats autonomes de renforcer leurs rangs, de se solidariser et de se mobiliser pour constituer une force de proposition et un partenaire social incontournable. En dépit des pressions de l'administration et de l'indifférence des pouvoirs publics, l'intersyndicale n'envisage nullement de baisser les bras ni d'implorer les pouvoirs publics à ouvrir les portes du dialogue, encore moins à faire la guerre au gouvernement. Etant légalistes, les syndicalistes comptent juste radicaliser leur action, investir davantage le terrain et ce, jusqu'à satisfaction de leurs revendications. Les centaines de travailleurs qui ont adhéré au mouvement de grève réclament tout simplement un statut leur assurant une dignité, une stabilité, des conditions de travail adéquates ainsi qu'un pouvoir d'achat leur permettant une vie décente. Mardi lors du sit-in qui a couronné les trois jours de protestation, le message des syndicats était très clair. « Nous sommes venus avec des stylos et des cartables (...) pour dialoguer et non pas pour faire la guerre. Nous voulons nos droits, nous voulons l'amélioration de nos conditions de vie pour sortir de la précarité et nous ne voulons pas de tuteur pour faire aboutir nos revendications », ont scandé les contestataires. Les représentants des travailleurs ne revendiquent pas un salaire qui va faire face à l'inflation, mais un salaire qui redonnera au fonctionnaire sa place dans la société. Ils ne demandent pas l'aumône, mais ne veulent pas faire la manche à la fin de leur carrière. Ces enseignants, ces éducateurs, ces médecins, ces simples fonctionnaires de l'administration algérienne représentent la colonne vertébrale de la société. Ils veulent juste une reconnaissance, ils veulent participer à des négociations pour mieux se défendre et défendre ceux qu'ils représentent. Lors du rassemblement devant la Grande poste, les manifestants ont regretté l'arrogance des pouvoirs publics et leur mépris affiché envers eux. La manière forte avec laquelle les cadres syndicaux ont été dispersés et chassés de leur lieu de regroupement par les forces de l'ordre renseigne sur l'absence de volonté politique de la part des pouvoirs publics à se pencher sur les revendications des enseignants et des travailleurs de l'administration publique, mais la « révolte » des travailleurs exprime incontestablement leur détermination inébranlable à arracher leur droit légitime. M. Lemdani du Cnapest, M. Cherbal du CNES et leurs collègues des six autres syndicats mènent un combat juste et légitime. Ces syndicats sont persuadés que le gouvernement utilise deux discours contradictoires, l'un pour tromper l'opinion publique en prônant la volonté d'ouverture et l'autre plus musclé qui veut nous empêcher d'approcher du palais « du chef du gouvernement ». « Nous sommes presque convaincus que le gouvernement veut pousser les grévistes à aller vers des grèves illimitées. Dans ce contexte, il sera servi puisque nous allons prochainement frapper fort », ont observé les cadres syndicaux qui condamnent le mutisme et l'autisme du pouvoir en place. Une réunion de concertation regroupera le 22 février prochain les huit syndicats pour dégager les actions à venir. « Nous sommes déterminés à continuer la lutte syndicale car rien ne s'offre. Nous sommes conscients que la solution réside dans la lutte et la solidarité, d'où l'unification des rangs et la fédération de toutes les forces syndicales »,a soutenu M. Lemdani. Par ailleurs, les syndicats dans leur ensemble ont admis qu'au-delà de la contestation, leur première satisfaction est d'assister à la naissance d'une construction de la résistance sociale dans la Fonction publique contre la dégradation du pouvoir d'achat. « Les bases de l'intersyndicale vont évaluer les résultats de trois jours de mobilisation pour élaborer des perspectives », a soutenu M. Cherbal en estimant que l'indifférence des pouvoirs publics envers les syndicats autonomes ne fait que conforter ces derniers dans leur position d'aller vers la radicalisation de la protestation.